Canada Dry
Un Cronenberg de l'époque où le Canadien officiait encore dans l'horreur biologique avec ce goût prononcé pour le morbide et le répugnant. Le Docteur Maglan (Oliver Reed imbibé plus que de raison)...
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Les premières minutes se vivent comme une plongée en apnée au coeur d'une secte. Un face à face monté comme un petit théatre, une thérapie bizarre où le gourou rabaisse son adepte/patient. Jeu de rôles purulent, la peau rougie et meurtrie. Parodie de catharsis que David Cronenberg filme pourtant pour exorciser ce qu'il vit.
C'est l'allégorie qui se cache plus ou moins derrière l'horreur et le traumatisme qui fait tout le prix du genre horrifique. L'allusion à la séparation houleuse subie par le réalisateur donne chair au récit, comme la colère féminine qui somatise en formes monstrueuses, comme un ressentiment sans repos prenant pour cible l'homme et l'entourage qui le soutient dans l'épreuve. Le canadien met déjà en scène la chair qui se déforme, comme en pleine mutation. La femme dans sa folie devient figure du mal ultime, mais sa fragilité psychologique l'humanise. Car Cronenberg ne se cantonne pas à filmer ce qu'il vit.
Chromosome 3, c'est aussi une histoire de transmission : celle de la rancoeur, de la violence physique et morale qui se communique telle une malédiction de la mère à la fille, comme un noir héritage inéluctable. C'est d'ailleurs la grand mère qui succombe la première aux assauts d'un agresseur indéfini et sauvage, aux traits lisses et sans expression, les yeux noirs de haine et nerveux. A mesure que la colère et la jalousie croissent, les accords musicaux bénis de Howard Shore se font de plus en plus désagréables, tandis que le récit prend des allures de conte, avec cette petite fille qui chemine dans la neige, encadrée de deux acolytes inquiétants en doudoune, frères fantasmés.
Cette enfant, quasi muette, ressent plus les choses qu'elle n'y assiste frontalement. Elle sera prise par la main tout au long du film, infantilisée, sans jamais avoir droit au chapitre.
Si elle n'a pas vu son père étrangler sa mère, geste libérateur, encore une fois cathartique et transparent pour David Cronenberg, les combles de sa conscience se noircissent, son regard, alors qu'elle est assise à côté de lui dans la voiture, est inquiétant, tout comme les prémices de l'infection sur sa peau.
Car quelque chose a survécu : le fruit de l'union au goût de la colère, porteur de la malédiction maternelle.
Behind_the_Mask, qui n'approchera plus jamais une femme de sa vie (ça fait trop peur !)
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le 12 août 2015
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