Sorti en 1950, Chronique d'un amour marquait les débuts de Michelangelo Antonioni au cinéma. Joliment restaurée en 4K, l'édition Blu-Ray sortie chez Carlotta nous permet de (re)découvir une des ses œuvres les plus méconnues, lorgnant à la lisière du film noir et du néo-réalisme.
D'abord critique cinéma dans différents journaux, le cinéphile Michelangelo Antonioni réalise ensuite plusieurs courts-métrages documentaires (voir Bonus) à caractère sociétal durant les années 1940. Fortement influencé par Luchino Visconti, et notamment Les Amants diaboliques (Ossessione en 1943, considéré comme le premier film néo-réaliste), il signe son premier film, Chronique d'un amour en 1950, dans la même région de Ferrare.
Principalement tourné en extérieur, avec de longs plans-séquences magnifiés par la photographie de Enzo Serafin et la musique fataliste de Giovanni Fusco, qui deviendront tous deux des fidèles collaborateurs du réalisateur de L'avventura, on assiste au premier essai réussi d'un des futurs grands noms du cinéma italien. Également scénariste, Antonioni est bien aidé à l'écran par son couple maudit incarné par la beauté froide de Lucia Bosé (Miss Italie 1947 devant Gina Lollobrigida!) et la culpabilité de Massimo Girotti (qui tenait un rôle similaire dans Les Amants diaboliques).
ASCENSEUR POUR L'ÉCHAFAUD
Le film préfigure aussi plusieurs thèmes « antonioniens » comme le triangle amoureux avec le mari suspicieux, ce portrait de femme troublante et troublée ainsi qu'un certain aspect social marqué par la différence de statut entre le mari millionnaire et l'amant au train de vie modeste. Toutefois, bien que souvent associé au genre néo-réaliste, Chronique d'un amour emprunte aussi la voie du film d'enquête avec le détective privé mandaté par le mari, et qui ironie du sort finira par réunir les deux anciens amants ! Ce « couple » dont l'histoire est entachée par un « accident » mortel dans un ascenseur renforce ainsi l'aspect film noir du long-métrage, tout comme le pouvoir de machination de la femme adultère, le sentiment de culpabilité d'un Guido manipulable, les regards fuyants et les silences auscultés par la caméra d'Antonioni.
Souvent un peu oublié dans la considérable filmographie de son auteur qui ne connut véritablement le succès qu'à partir des années 1960 (L'avventura, Blow-Up...), ce Chronique d'un amour à la dimension tragique et au style visuel déjà bien affirmé, mérite vraiment le détour, qui plus est dans cette superbe version restaurée.
Retrouvez l'évaluation de la partie technique du Blu-Ray sorti chez Carlotta par ici : http://www.regard-critique.fr/rdvd/critique.php?ID=7115