Chungking Express (1994), « rafraichissant comme une bouteille de Coca-Cola » (Wong Kar-Wai, entretient dans Positif n°525, Novembre 2004). Euphorisant même. Mais ne vous-y trompez pas : si le film est bien léger, il n’en est pas moins profond et emprunt d’une douce mélancolie. Se plonger dans la « Forêt de Chongqing » (重慶森林,Chongqing Senlin), et se laisser emporter par cette danse où l’on se croise sans se connaître ni même se toucher, c’est aussi se laisser bercer par un rythme savamment orchestré, passer d’une rive à l’autre de Hong Kong sans le savoir, écouter les bruits d’une ville fantasmée et mieux rendue, pourtant, que jamais.
Wong Kar-Wai a tourné ce film alors que la post-production des Cendres du temps s’éternisait. En très peu de temps, il a réalisé cette œuvre bien plus modestes mais tout aussi magique, qui si elle consiste en un diptyque ne souffre pourtant d'aucune discontinuité. On passe d’une histoire à l’autre sans sursaut, sinon celui du choc d’un personnage qui se cogne à un autre et lui passe le relais de l’histoire à écrire.
Dans Chungking Express, tout a une date de péremption. Les gens, l’amour, et aussi Hong Kong telle qu’on la connaît à cette époque. Plane sur le film cette peur palpable que ressentaient les Hongkongais, dans l’attente de la rétrocession de l’île à la Chine en 1997 (le film date de 1994). C’est cette ambiance particulière, où chacun se sent seul ou veut partir, où on a peur du changement qui a déjà commencé sans qu’on l’admette et qui demeure inévitable, que parvient à faire vivre sur l'écran le réalisateur. Sans jamais l’expliciter, Wong témoigne ainsi d’une époque tout en parlant de thèmes universels...
Vous pouvez retrouver ma critique complète du film sur mon blog : http://ombreselectriques.wordpress.com/