Cinq Femmes autour d'Utamaro est sans doute l'un des plus beau portrait cinématographique de l'artiste que j'ai pu voir.
Non seulement par la mise en scène et la photographie, toutes deux excellentes (peinture sur corps, scène de pêche, lents travellings latéraux, etc.), mais aussi par ce qu'il raconte et comment il le raconte.
Déjà Mizoguchi évite l’hagiographie, que ce soit celle d'Utamaro ou indirectement la sienne. L'artiste n'est pas montré comme supérieur, meilleur, plus tourmenté, plus humain voire plus divin, comme touché par la grâce (ou au contraire une forme de malédiction). Non, l'artiste est un homme comme un autre. Avec ses pulsions, ses vices, ses erreurs, ses doutes, ses tourments, son orgueil, ses peurs, ses forces et ses faiblesses.
Et pourtant Mizoguchi parvient malgré tout à provoquer notre admiration, à distinguer l'artiste de l'artisan et ce dès le début du film. C'est la transformation qui s'opère chez Seinosuke. L'artisan suit les règles qu'on lui a inculqué. L'artiste les transcende, les dépasse, les transforme, se crée son espace de liberté.
Mizoguchi explose le portrait d'Utamaro en un portrait multiple. Utamaro n'est pas qu'Utamaro. Chacune des 5 femmes qui l'entourent sont une part de ce qu'il est. Symboles de passion, d'idéaux, inspirations de l'artiste, rattachement au quotidien, drames et joies. La vie se déroule autour de lui. S'il n'est pas toujours au centre des histoires il n'en n'est jamais absent non plus, acteur ou observateur, personnage principal ou secondaire. Les histoires s'entremêlent et, de ces multiples instants de vies plus ou moins séparés, de ces fils de soie, Mizoguchi tisse un monde vivant et vibrant, plein d'humour et d'émotions. S'il ne peut le montrer dans son entièreté du moins il y déploie une richesse et une diversité impressionnante.