Je me demande encore comment on a pu en arriver là. Comment les choses ont pu tourner ainsi depuis le Big Bang pour qu'une écrivaine frustrée de la vie et une réalisatrice en quête de reconnaissance puissent pondre un truc pareil. Qu'avons nous fait, God.


Petit rappel, pour ceux qui n'ont pas allumé leur télé ces dernières semaines. Le film suit Anastacia Steele, une jeune étudiante vierge au look de mamie se baladant dans une Coccinelle (ça existe encore ça ?) qui doit interviewer Christian Grey, un ‪#‎bogoss‬ milliardaire à la tête d'une gigantesque société.


Ils se séparent après l'interview. Christian. Ana. Les portes de l'ascenseur se ferment. Une première scène qui résume complètement le film : la réalisatrice joue la carte de l'humour mais veut se prendre au sérieux. Car c'est sûrement là que le film se trompe, coincé entre les enjeux commerciaux, l'attente de l'auteur et du grand public (adolescents attardés et adultes qui essaient de sauver leur mariage), « 50 Nuances de Grey » veut plaire à tout le monde et se rate sur tous les tableaux.


De nombreuses scènes sont involontairement drôles, comme celle où Christian Grey, après avoir « baisé brutalement » pour le paraphraser, s'en va jouer du piano dans son salon. Quoi de plus normal. Moi aussi, après avoir fait l'amour, il m'arrive de jouer du ukulélé en chantant du Balavoine.


Mais bon, après tout c'est pas ça que tout le monde attendait, comme vous tous (avouez le) nous attentions le film pour les scènes de sexe, pour le S&M, on voulait voir des corps nus faire l'amour comme des bêtes, des lits trembler, des mains attachés, des cris de jouissance dans toutes les positions possibles putain !!! Et bien pour résumer, la tension sexuelle débitée par « 50 Nuances de Grey » est comparable à celle d'un épisode des « Feux de l'Amour ». Encore, ce serait insulter cette série mythique (42ème saison, Breaking Bad n'en a que 5 => CQFD). Le film n'est pas sexy, totalement coincé et glacé car les scènes de sexe ne sont jamais hot, mal filmées et trop explicites. La tension ne monte jamais car les protagonistes passent directement à l'action, sans préliminaires.


Christian est le dominant, il fait se qu'il veut de sa dominée, Anastacia, en échange de lui-même. Ils ne dorment pas ensemble, ne vivent pas ensemble, ne sortent pas ensemble, ils ne font rien à part bais..Copuler. Ils communiquent par des SMS que l'on voit affichés en pop-up sur l'écran, comme dans la pub du Crédit Agricole. C'est donc cela que l'on donne comme image du romantisme aux jeunes ? Une génération Tinder enfermée dans leurs réseaux sociaux, une génération qui veut s'épargner tout sentiment, une génération consommant du sexe comme de la drogue ?


Pire, Anastacia a un orgasme dès sa première fois avec Christian. Sérieusement, est ce que ceci est déjà arrivé à l'une d'entre vous ? Rocco Siffredi don't approve that. Les moments supposés S&M ne le sont pas du tout, un glaçon et quelques coups de fouet avec un martinet. Finalement, « 50 Nuances de Grey » n'est qu'une énième histoire d'amour sans folie, aux airs de déjà-vu, et cette intrigue autour du S&M n'est qu'un prétexte pour cacher l'absence totale d'enjeux du film.


Il faut attendre les 5 dernières minutes et une scène éprouvante psychologiquement pour voir une évolution des personnages, un peu de profondeur et les rôles s'échanger : les sentiments font surface, le dominant devient le dominé, la dominée devient la dominante. Ana. Christian. Les portes de l'ascenseur se ferment.


Malheureusement, ces dernières minutes se suffisent pas à sauver le film, menotté par son statut d'adaptation de best-seller, forcé à subir les coups de fouet des clichés de la romance. Qui c'est, on peut espérer le tournage de la suite à la fistinière, car comme on dit, quitte à se faire enculer, autant que ça soit fait avec amour.

Antoine_Nichols
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le 19 mars 2015

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