Coincé entre Jackie Kennedy occupée à refaire les moquettes de la Maison Blanche et Liam Neeson parti évangéliser ces païens de nippons bouffeurs de riz et de jésuites, Cinquante nuances plus sombres est une lueur d'espoir pour le cinéphile masochiste engourdi par l'hiver. La promesse d'une grande réflexion sur la condition féminine, le bien-fondé des franges quand on fait un tour en yacht et les joies de l'intertextualité par SMS.


L'enjeu de cet opus, pour ceux qui débarquent ou qui ont fui sans demander leur reste dès le premier film (excellent choix) est totalement actuel : comment monter un emploi fictif pour payer des sommes folles une fille qui ne fait que répéter qu'elle n'est rien, qu'elle ne sait rien faire et qui glousse dès qu'on lui pose une question ? Qu'elle a besoin de réfléchir des heures entières sous la pluie pour savoir si oui ou non elle veut bien retourner faire la potiche dans un penthouse ? Qui plus est, sans contrat cette fois, "plus aucune règle" comme l'annonce fièrement l'affiche. Ça va lui faire une jambe quand l'URSSAF viendra lui demander des comptes.


La méthode proposée par le film est assez simple : acheter l'entreprise dans lequel bosse votre copine, virer le patron après qu'il a tenté de proposer un déplacement professionnel, le faire remplacer aussitôt par votre esclave toute étourdie d'avoir traversé le plafond de verre sans même avoir passé des années à apporter le café. Puis, enfin le coup de grâce : lui proposer le mariage et simuler un crash mortel d'hélicoptère sur BFM pour que vraiment elle soit piégée définitivement, sans jamais aucune possibilité de s'enfuir.
Bon évidemment, il faut dépenser un peu au début et avoir une bonne assurance au tiers pour votre hélicoptère, mais après ça, personne, même pas le Canard Enchainé, ne viendra mettre le nez dans votre linge sale et vos petites culottes en dentelle.


Et, parce que la fraude fiscale n'a jamais attiré les foules au cinéma, il y a plein d'intermèdes de scènes de sexe, ou plutôt de contorsions de gym suédoise sans poil ni sueur, nappées par une bande-son assez similaire à celle d'un Monoprix de province au rayon surgelé, poussée à son maximum pour éviter d'entendre les ricanements gênés des spectateurs. Mais aucun fouet. Du coup, mieux vaut revoir la Passion du Christ pour une bonne scène de flagellation bien sanglante.


Je ne parlerai pas du jeu des acteurs, d'ailleurs je ne me rappelle déjà plus de leurs noms, mais je ne pense pas qu'il faille les encourager dans cette voie dangereuse alors qu'il existe tant d'autres métiers fascinants pour exprimer pleinement leur potentiel comme coursier à vélo, statisticien au CNRS ou mannequin chaussette pour la Redoute. La reconversion est encore possible. Ce n'est malheureusement plus le cas pour Kim Basinger, gérante d'un salon de coiffure qui vend des shampoings au nom prometteur Esclava (c'est à ce genre de détails subtils que nous comprenons qu'il faut se méfier des blondes qui se la jouent mères-maquerelles), se prend des verres de Martini sur sa figure toute botoxée. La vieillesse, ce naufrage.


Voilà. C'est à peu près tout. Et si vraiment vous voulez tout savoir :


à la fin, il y a un feu d'artifices sur un lac. Et une grosse bague en diamant pas déclarée. Parce que l'amour, le Dow Jones et le BDSM triomphent toujours de l'adversité, de la psychologie féminine, des toxicomanes et des agents du fisc.


Vivement la suite. 365 jours de suspens intenable avant le 7 février 2018.

Socinien

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