De dures critiques pour un film si doux

Evidemment, Clara est un film qui ressemble à tant d'autres sous certains aspects : une vie brisée, une rencontre inopinée, un amour impossible, des dramas... Mais réduire Clara à ces sujets, à ces poncifs pourrait-on dire, c'est le réduire de manière malhonnête et extrême.

Il faut tout d'abord noter la performance de Patrick Adams (Isaac), tout en subtilité, en douceur, et qui dégage en même temps la force d'une rationalité assumée et la fragilité d'une simple condition humaine.

Mais il faut surtout noter le soin de la réalisation. Tout est fait avec intelligence et justesse : l'atmosphère acoustique du film, mais plus encore la photographie, qui parvient à merveille à mêler la beauté des couleurs utilisées au symbolisme des images. C'est un film qui est très bien construit, et les dix dernières minutes le montrent. En effet, de nombreux éléments en apparence anodins s'interconnectent pour offrir une seconde lecture au film, celle de Clara, celle de l'intuition toujours rendue silencieuse par la rationalité.

C'est là d'ailleurs qu'on arrive au véritable nœud du film, car la question qui nous reste à la fin, doit être la même que celle qui reste à Isaac après toutes ces aventures : qui est, qui était, Clara ?

D'où la double lecture du film si soigneusement amenée et portée par ce personnage. Certes, Isaac est le personnage principal de ce film : on suit son passé, son obsession, son travail, ses théories. Mais l'élément central du film, qui lui apporte sa poésie, sa bivalence et finalement sa profondeur, c'est bel et bien Clara. Clara qui apporte une double lecture à Bob Dylan, Clara qui apporte une double lecture aux pierres, Clara qui apporte une double lecture au dessin...

C'est donc à la fin à un film quasi mystique que l'on a affaire, dans lequel tout devient porteur de sens, de vie et de poésie. Et l'on ne peut que sortir - il me semble - touché et ému d'un tel projet.

Ce film est donc à mon sens réussi, car élégant, documenté et sensible. Il repose certes, peut-être, sur des ressorts scénaristiques faciles, mais il en fait autre chose. Il se contente de les utiliser comme fondements pour les dépasser. Ils ne servent qu'à supporter une réflexion plus approfondie, plus symbolique, et en ce sens bien plus humaine.