Une Symphonie du Temps et de l'Existence
Il m'aura fallut du temps pour affronter cette bête. Assis 3 heures devant un film dont je n'ai vu qu'une affiche (un peu) trop stylisée, je cherchais constamment autre chose à faire (regarder 2 ou 3 blockbuster débilitant du dimanche matin en réserve, ranger ma chambre, ...). Puis vint le moment fatidique de la nuit blanche, ayant épuisé tout autre échappatoire ainsi que ma volonté de luter, je me lance. Comme à mon habitude, mon cerveau se prépare en mode "autistique", regarder, juste regarder, tu réfléchiras demain.
Et ce fut une rencontre miraculeuse. Une oeuvre comme je les aime dans tous mes états. Cet objet cinématographique hybride les genres, pari dangereux pour le grand écran, nous proposant divers histoires entremêlés au travers des époques et nous voilà oscillant entre drame, science fiction, aventure, comédie et policier. Dans l'ordre, le désordre et plus si affinité.
Voilà un film comme je les aime, à l'instar d'un Mr Nobody, Cosmopolis ou encore Southland Tales, le spectateur doit accepter de se laisser guider par les images et le son, sans poser de question, observateur de l'entremêlement d'histoires rythmés, et se laisser prendre par une ingénieuse harmonie qui se dégage de cette danse, cette symphonie avec ses lenteurs, ses instants plus rudes, jamais vraiment frénétique ni stagnant. Constamment mouvant mais parfaitement contrôlé, il faut se laisser bercer par le film, accepter de se perdre au seins de multiple diégèses auxquelles on ne comprendra pas toujours ni les tenants, ni les aboutissants ; On se demande à un moment quelle rapport il peut y avoir entre ses histoires tout en ayant, au fond, comme un murmure, un petit quelque chose qui fait résonance entre elle, sans pouvoir vraiment mettre le doigt dessus.
Bercé par une ambiance romantico-post-moderne, parfois intimiste, certainement poético-philosophique, interrogeant le sens de notre existence, notre place dans l'espace et le temps, nos croyances profondes, nos rêves, notre volonté de survie, notre condition d'être humain et plus largement d'être vivant, on s'étonne d'avoir survécu 3 heures sans s'ennuyer, sans même regarder l'heure une fois.
Les liens scénaristiques ténus entre chaque époque sont renforcés cependant par l'utilisation des même acteurs jouant différents rôles, au service des questionnements métaphysiques et existentialistes que soulève le films.
Un petit bout de poésie, une performance d'acteur convaincante, laissez-lui sa chance, laissez vous porter, et, en gardant l'esprit ouvert, en prenant ce qui vous vient comme cela vient, vous passerez un excellent moment devant une oeuvre rare du Grand Ecran.