Je l'ai vu ! C'est vivant ! C'est énorme !

Parfois, je me balade sur Sens Critique et certaines choses me sidèrent... Comme par exemple, de tomber sur quelques-uns des avis parmi les plus likés sur ce Cloverfield qui ont, pour seule et unique argumentation, de se permettre de qualifier de "connards", ou encore de "geeks cons" ceux qui, d'aventure, auraient aimé le film. Sens Critique ? Vraiment ?


Autant donc le dire tout net : dans ce cas, je suis un gros connard de geek. Voilà. Rien que de le dire, ça soulage. Exercez-vous devant votre miroir, vous verrez... Et cela vous aidera certainement à assumer votre mauvais goût écoeurant aux yeux des bien-pensants qui ne manqueront pas de tenter de vous remettre dans le droit chemin, par la force si nécessaire, ou la rééducation toute kubrickienne en ultime recours.


Cloverfield pourrait s'envisager, à la vue du monstre qu'il convoque, sorti de nulle part, comme la toute première incursion d'un Kaiju que le Guillermo Del Toro de Pacific Rim aurait pu mettre en scène. Il se cache tout d'abord, et Matt Reeves ne le montre qu'avec parcimonie, ou de manière très parcellaire. Et le spectateur est au même niveau que les héros, pour lesquels reviennent sans doute en mémoire les images traumatiques d'une certaine année 2001, avec son énorme nuage de poussière qui monte et dévore les immeubles, cette tour penchée contre une autre, son explosion initiale qui résonne comme un nouvel acte terroriste. Puis l'engeance gigantesque s'anime, imposante, à l'allure démesurée alors qu'elle est filmée en contre plongée. Terrifiante, qui saisit et glace le sang.


Par contraste, une vue aérienne fugitive du monstre, filmé de l'intérieur d'un hélicoptère, tendrait à le rendre presque grotesque : nu, chancelant, comme désarticulé parfois et peu assuré dans ses mouvements. Mais il sème de la même manière, pourtant, mort et désolation sur son passage.


Cloverfield met en scène le chaos vécu de l'intérieur, l'impression de danger permanent sur lequel, dans un premier temps, il est impossible de mettre un nom, sinon celui de destruction, d'effroi, d'attaque, d'apocalypse.


Les lumières de la ville s'éteignent, la musique de la fête d'adieu laisse place au silence. Puis aux grondements. Cette fête qui a quelque peu tourné à l'aigre, où l'on s'est lancé des sentiments exacerbés à la tête, ce sera une des dernières choses que l'on aura vécues avant ce qui semble être une fin du monde, avant que la tête de la statue de la liberté ne roule dans une avenue de Manhattan et que les flashs infos s'emballent.


A partir de ce moment, une fois les personnages présentés, une fois les relations tissées et les enjeux dessinés, Cloverfield se transforme en un véritable survival électrique et tendu qui prend littéralement à la gorge, où l'on guette le danger à chaque coin de l'image et dont on tente, dans un premier temps, de percer la nature. Caméra à l'épaule, immersion totale, le chaos se vit, se ressent, en forme d'urgence et de fuite, rythmé de sursauts et d'images tout aussi chocs que fugitives.


Cloverfield, finalement, même s'il y a un monstre dedans, c'est avant tout une histoire d'amour. De toutes celles qui finissent mal en général. Une histoire qui petit à petit s'efface, écrasée par le témoignage vidéo qui fixe sur la bande magnétique le spectaculaire et le monstrueux. Mais la vie d'avant ressurgira par instants, comme par flashs lumineux, dans les décombres de la ville, ou au coeur des ténèbres.


Comme pour se souvenir des sourires, de ce qu'on l'on éprouvait pour l'autre, du soleil aveuglant, tout cela, le temps d'une journée partagée à Coney Island.


Behind_the_Mask, Monstres & Cie.

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le 13 août 2016

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Behind_the_Mask

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