Le principe de "7500" est simple, les intentions de Patrick Vollrath, dont il s'agit du premier long-métrage, sont claires : se livrer avec l'aide de son acteur, Joseph Gordon-Levitt, à un pur exercice de tension, en conjuguant ultra-réalisme d'une action filmée quasi en temps réel et enfermement radical des protagonistes, le tout servi par un thème hautement anxiogène pour quiconque voyage au moins occasionnellement en avion, celui du détournement terroriste. Nous passons donc les courtes 90 minutes du film enfermés dans un cockpit d'avion, en compagnie de quatre personnages, deux pilotes et deux terroristes, dont nous ne saurons pas grand-chose...
Si l'on envisage très vite la possibilité qu'il n'y en aura qu'un seul qui sortira vivant de là, si le dépouillement radical du film (nulle psychologie, nul éclairage politique, social, ou simplement humain, sur les faits - terribles - qui se déroulent implacablement devant nos yeux) donne malheureusement souvent l'impression qu'il est plus le fait d'un budget très limité que d'un choix esthétique ambitieux, il est difficile de ne pas se laisser embarquer par la tension extrême que fait naître Vollrath.
Nombre de spectateurs se sentiront sans nul doute "floués" par le vide du film, tant thématique que psychologique, mais reconnaissons qu'il est aussi possible d'adhérer à "7500", en dépit d'une fin qui n'est pas au niveau de tout ce qui l'a précédé... même si elle refuse intelligemment (oui, oui !) toute concession aux paroxysmes spectaculaires qui sont de mise dans les films commerciaux, mais surtout - et c'est encore plus louable - toute réconciliation et toute épiphanie. A l'image de la très efficace introduction flottante filmée à travers les caméras de surveillance de l'aéroport de Berlin, et surtout de la mort sans pathos de TOUTES les victimes du drame, la conclusion de "7500" est véritablement noire, presque nihiliste, et rachète à nos yeux les petites faiblesses du film.
Car, si l'on a apprécié l'absence - réellement rafraîchissante - de musique tout au long du film, et les vrais efforts de lisibilité de l'action dans un espace aussi confiné, si Gordon-Levitt est parfaitement crédible en homme ordinaire broyé par une situation extraordinaire - au point qu'il ferait un bon successeur à notre cher Tom Hanks -, on tiquera forcément sur un scénario qui plante un co-pilote américain dans un avion allemand à Berlin : outre le fait que cela permet à Amazon de placer un acteur internationalement plus bankable qu'un "local", cela offre aussi certaines facilités scénaristiques en termes d'incompréhension entre les personnages parlant allemand, turc et anglais.
Après, chacun réagira, ou pas, au film, en fonction de ses attentes : "7500" n'est pas une oeuvre d'art, c'est certain, et son jeu avec l'ultra-réalisme - qui peut évoquer le "Vol 93" de Paul Greengrass - le pare d'une indéniable ambiguïté, en l'éloignant des codes du cinéma de divertissement. Si l'on accepte cette "manipulation", et les choix assumés de Vollrath, il n'est pas impossible de sortir de "7500" plutôt impressionnés. Ou disons au moins curieux de suivre la future trajectoire de ce jeune cinéaste.
[Critique écrite en 2020]
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