Quelques années plus loin, quelques lignes d'un auteur dont le nom n’est pas resté dans ma petite tête ironisaient sur la censure de tout élément relatif au tabac, suite à une polémique sur une affiche pour une exposition de Jacques Tati qui avait perdu sa pipe. Coffee and cigarettes était cité par cet auteur, imaginant ce que ce climat de censure pourrait lui réserver. C'était mon premier contact avec ce film, la première fois que j’en entendais parler. Depuis, j'ai eu l'occasion de me rendre compte de l'importance de Jim Jarmusch dans les discussions cinéphiles et de ce film en particulier.
Dans différents lieux propices à la convivialité, différents acteurs ou chanteurs, qui jouent leur propre rôle, se rencontrent, échangent, et, souvent n'ont rien à dire. Ils boivent du café et fument des cigarettes. Les acteurs du film avaient la possibilité d'improviser leur texte, et certains ne se sont pas fait prier, il aurait même été dommage de ne pas leur laisser cette possibilité, vu leur personnalité.
Ce qui n'était qu'un puis deux puis trois court-métrages a été réuni en ce film, assemblé en tout de 11 segments. C'est une collection disparate, sans fil rouge entre eux, hormis le café et le tabac. Certaines de ces rencontres font des étincelles, et c'est souvent dans l'absurdité de certaines discussions que se trouve tout le sel, ou le sucre.
Jim Jarmusch réunit un casting de personnalités fortes, qui crèvent l'écran, mais dans des rôles qui ne les mettront pas en valeur, où ils se mesurent à la difficulté de parler d'eux-même, de trouver du sens. Tous jouent un rôle, une interprétation d'eux-même. C'est un bel hommage qui leur est rendu. Mais il est difficile de ne pas voir le film aussi comme un petit plaisir que s'offre Jim Jarmusch, un film avec ses amis ou ceux qu’il admire. Tous sont méritants en s’en donnant à coeur joie, mais il y a aussi dans ce film un entre-soi entre artistes et une collection de beaux noms qu'il serait facile de commenter, d'autres le font, je leur laisse.
Délicieusement creux, mais aussi gênant par moments, quand l’exercice semble délaisser le spectateur pour laisser trop de place aux acteurs, comme si le film n'était que pour eux. Mais il faut reconnaître que Jim Jarmusch sait aussi admirablement filmer les tables de café.