Attention, ne pas lire si vous n'avez pas vu le film
Alors en préambule, je tiens à dire que je n'étais pas un expert de la vie de Colette avant de regarder le film, mais j'en ai toujours eu l'idée d'une femme forte ayant grandement fait évoluer les mentalités.
Ce qui nous amène au premier et plus gros des défauts du film : Colette apparaît comme sans envergure et extrêmement banale. Malgré tous les moments où elle se fait tromper et humilier par son mari, elle reste tout de même jusqu'à la fin du film avec lui; au mieux elle s'éloigne un peu mais finit toujours par revenir et sans aucune raison vraiment valable au vu des atrocités qu'elle a subies : Willy la trompe avec sa première aventure, révélant son désir essentiellement patriarcal de contrôler tout ce qu’il se passe dans sa vie ? Pas de soucis, un peu de boudin et on passe à autre chose. Il l’enferme contre son gré et la force à travailler pour un écrit sur lequel elle ne sera même pas créditée ? Pas cool. Et doit-on vraiment parler du, en substance, "tkt bb je t'offrirai un chien xD" -"ouah un doggo trop mims merci mamour" ?
Et cette soumission taciturne se retrouve à d’autres endroits du film. Par exemple, Willy peut avoir des aventures comme bon lui semble, mais il ordonne à Colette de ne sortir qu’avec des femmes, ce à quoi elle se tient bien gentiment. Il faudra attendre la fin du film, qu’elle se fasse dépossédée, en plus de sa dignité qu’elle a perdue depuis longtemps, de tous ses biens et droits pour qu’enfin elle parte; puis qu’on nous serve quelques petites phrases avant le générique de fin racontant une de ses plus grandes victoires, à savoir la reconnaissance de son travail.
On pourrait rétorquer que c’est une biographie, que les faits sont ce qu’ils sont et donc par nature incontestables. Comme dit précédemment, ne connaissant pas la vie de Colette en profondeur, je ne m’aventurerai pas à remettre en cause tel ou tel évènement (même si à mon humble avis, et comme c’est très très souvent le cas des biopics, des libertés plus ou moins grandes ont dû être prises). Mais ça ne justifie en rien la quasi-inexistence de réaction du personnage. Elle ne semble jamais vraiment en colère, accepte tout ce qui se passe sans ne jamais se révolter franchement. Dernier exemple parce qu’ils ont tendance à se répéter, lorsqu’elle se fait huer, insulter, humilier après sa représentation au Moulin Rouge, son visage est certes légèrement plus crispé que d’habitude, mais pour une femme connue pour son tempérament de feu, c’est une bien maigre réaction.
Et si avoir un personnage principal plat et trahissant l’original, voire pire encore, trahissant les idéaux de l’original, ne suffisait pas, on nous sert une flopée de gus tous moins intéressants les uns que les autres, sorte de clichés sur pattes, lourds et maladroits (à l’exception peut-être de la marquise, mais qu’on voit finalement assez peu).
A cela s’ajoute une réalisation qui, sans être mauvaise (à part peut-être quelques moments douteux mais là ça devient très subjectif), ne brille jamais; des musiques qui viennent mettre l’emphase sur des moments d’émotion inexistants et tombent comme des cheveux sur le soupe; un jeu d’acteur des plus moyens et même une Keira carrément mauvaise, malgré tout l’amour que j’ai pour elle.
En conclusion, là où je voulais voir la vie romanesque d’une des plus grandes romancière, et même d’une des plus grandes femmes jamais née en France, je me retrouve avec presque deux heures complètement inhabitées sur les bras. Et en plus de ne prendre aucun risque et d’être d’une platitude exemplaire, j’ai l’impression que le film trahit avec une violence inouïe à la fois son spectateur, son personnage et son propos.