Combat shock faisait partie des films que j'aurais dû revoir, simplement parce qu'il fait partie de ceux que j'ai vu une première fois en faisant autre chose en même temps, sans tout comprendre de ce qui se disait en VO, et sans trop m'en soucier, après quoi j'écrivais un avis qui ne pouvait tellement correspondre à ce que j'aurais dû vivre en le voyant correctement.
Toutefois je ne l'aurais certainement pas revu, avec toutes les œuvres que je n'ai déjà pas le temps de regarder, si je n'avais pas eu une autre raison pour le faire. Au début du mois prochain, il y aura l'Etrange festival, je me prépare en comptant revoir Machine girl et Tokyo gore police pour Yoshihiro Nishimura, mais aussi Combat shock, dont le réalisateur, Buddy Giovinazzo, fera acte de présence pour le film à sketchs "Theatre bizarre". Il faut donc que je m'assure que ce film soit à mon programme.
Je voulais voir le director's cut sorti il y a deux ans en DVD, à peu près à l'époque où j'étais dans ma série des Troma et où j'avais vu ce film. Je comptais comparer le montage qui était celui voulu par Giovinazzo à l'origine avec les souvenirs que j'avais de celui sorti en salles, mais malheureusement je n'ai pas pu le trouver.
Au moins, j'ai pu avoir des sous-titres français avec la version cinéma, et il y a toujours ce site pour avoir une idée des différences entre les versions :
http://www.movie-censorship.com/report.php?ID=4930598

Parmi les questions que je comptais poser au réalisateur, l'une concernait le bébé horrible du héros, qui était trop bizarre par rapport au reste du film, et que je m'imaginais avoir été imposé par Troma, ce qui est plus ou moins confirmé par le fait que peut-être tous ses plans sont absent du director's cut. Je demanderai.
En tout cas à en croire le site ci-dessus, ce n'est pas le seul changement effectué entre la première version, "American nightmare", et "Combat shock". Pour le vendre comme un film de guerre avec une affiche en adéquation, des stock-shots du Vietnam ont été rajoutés. J'ai beau adorer Troma, je ne doute pas que Lloyd Kaufman et compagnie en viennent à de tels procédés pour vendre leur marchandise. Lloyd a beau classer ce film-ci parmi ses "tromasterpieces", il donne l'impression que la qualité de son produit lui échappe, rien qu'à voir la présentation du DVD qui est dans l'esprit bouffon de la plupart de leurs productions, mais ne correspond nullement avec Combat shock, qui doit être un des seuls Troma sérieux qui soit.
Le réalisateur, dans une interview, semble tout de même satisfait, désignant Troma comme la seule compagnie qui a cru en son film. Lloyd Kaufman a même eu le culot d'envoyer une copie "uncut" aux salles de cinéma au lieu de celle classée "R", ce qui est après tout une preuve d'implication de sa part.
EDIT 6/09/2011 : Correction, après avoir parlé au réalisateur, il semblerait que j'aie bel et bien vu le director's cut, qui était sorti en France sans coupures à l'époque, et le bébé n'a pas été ajouté par Troma.

C'est donc au Vietnam que débute le film, avec 50% stock-shots de bombardements, 50% d'images du héros, tout seul, qui avance l'arme à la main. Combat shock est un film assez fauché, mais qui a un fond qui lui permet de se rattraper, avec quelques éléments intéressants : le héros qui constate ne rien savoir de l'ennemi sauf que celui-ci veut le tuer, et qui plus tard est tiraillé au moment d'appuyer sur la gâchette, hésitant entre le fait qu'il a une jeune femme dans sa ligne de mire et ce qu'on lui a fait entrer de force dans le crâne comme quoi ces gens sont forcément ses ennemis.
Ce sont ces constatations et remarques sur la guerre qui avantagent ce film handicapé par le manque de moyens. Les plantes au milieu desquels circule Frankie ne se trouvent certainement pas au Vietnam et n'ont rien à voir avec ce que nous montrent les stock-shots, et en dehors de ces décors douteux l'image est peu esthétique, il y a des flares, une température de couleur qui varie selon les plans, des cadavres qui jonchent le sol de façon peu crédible, ... Les acteurs du film ne sont pas pros, le héros est joué par Rick Giovinazzo, frère du réalisateur, et il n'a jamais joué ailleurs avant ou après. En fait il a suivi une carrière de compositeur et orchestrateur, et a bossé sur Inception, Rango, American gangster, et bien d'autres grosses productions. Son premier travail de compositeur, il l'a d'ailleurs effectué sur Combat shock, et la musique est justement le premier élément positif qui nous apparaît, dès le générique de début.

L'image est donc crade, à cela s'ajoute la sueur sur le visage du héros, qui rend sa tignasse dégueu et collante, mais Combat shock fait partie de ces films qui en profitent à bon escient. L'image a l'air de sauter par exemple lorsque Frankie est écartelé entre deux choix, et là il n'y a plus à douter que c'est volontaire.
L'aspect dégueulasse perdure au delà du Vietnam et se retrouve dans le quotidien de Frankie, illustrant son tromatisme. Il est pauvre, sans boulot, il ne peut nourrir sa famille, ses deux chaussettes ne se correspondent même pas, c'est la misère et le désordre. Autour de lui, la représentation pessimiste du monde par Buddy Giovinazzo n'est pas mieux, des cris s'entendent dans la rue, un chien a récupéré sa bouffe dans une poubelle, et un peu comme dans Street trash (sorti un an plus tard), les environnements moches sont recherchés afin de pouvoir filmer les tags salissant les murs et les ordures jonchant le sol.
Il arrive à Franky de revenir au Vietnam involontairement, et il y a une scène qui l'illustre très bien : son esprit le quitte un instant tandis qu'il est dans sa cuisine, et on est en transe comme lui, on entend nous aussi quelqu'un crier "Franky" dans un souvenir lointain, le son presque irréel du robinet à côté nous hypnotise, et il y a besoin d'un plan large pour qu'on en sorte et reprenne nos esprits. Le motif du robinet est de retour plus tard aussi, et cette fois on plonge complètement dans le flashback, et on constate que le bruit de l'eau était en fait le déclencheur, lui rappelant sa perfusion à l'hôpital militaire.

Le scénariste et réalisateur veut visiblement à tout prix faire un film aussi négatif que possible, et c'est dommage de voir dans quelle surenchère il se lance pour cela : Frankie est torturé au Vietnam sans qu'il ne puisse rien confesser à ses bourreaux, puis même une fois soigné une nurse l'oblige à prendre de la morphine, bien qu'il ne souffre pas, car "c'est que ça fait déjà effet". Une fois de retour aux USA, il a des dettes envers des gens peu recommandables, il ne peut trouver de boulot ni suivre d'études à cause des réductions des aides de l'Etat, pleins de souvenirs de la guerre lui reviennent dont tout le temps qu'il a passé dans une cage, il se rappelle de disputes avec son père, et voilà maintenant qu'on va le foutre à la rue, avec sa femme enceinte et son bébé mutant qui a l'air d'un alien gluant et dont les pleurs et cris font penser à une sirène de pompier !
L'ajout des stock-shots de guerre au début peuvent finalement s'expliquer, elles servent à rendre plus crédible cet homme en tenue militaire dans un décor qui n'évoque pas le moins du monde le Vietnam sans les images d'archives qui l'entourent, mais le bébé quant à lui est complètement inutile et produit un peu l'effet inverse.
Ce n'est pas tout puisque par le biais d'un ami drogué de Frankie, nous avons un aperçu de la journée d'un junkie, qui vole pour de la drogue, supplie un dealer, se dispute et baratine un de ses comparses pour garder sa dose, et finit par se droguer comme il peut en étant dépourvu de seringue.
Il ne faut pas oublier non plus la rencontre de Frankie avec deux gamines prostituées, l'absence d'offre d'emplois, la poubelle où de la viande est rongée par des vers, et l'appel téléphonique du héros à son père, seule séquence vraiment émouvante du film malgré toute l'exagération qu'elle comporte (le père a tout perdu et préfère oublier le passé, son fils inclus). Et comme si ça ne suffisait pas, il y a un homme qui pleure juste à côté de la cabine téléphonique lorsque Frankie en sort.
Tout ça en une journée !

Combat shock ne se montre donc pas toujours bien subtil dans ce qu'il veut signifier, à l'instar de ce plan qui, au cours d'une scène, se détache des personnages, et ce pour filmer un tag "love and peace" dans une maison délabrée.
Il faut aussi remarquer du côté du montage quelques maladresses. La scène où une fille passe en moto devant une file d'attente dure trop longtemps, et on ne cesse d'entendre des "woouh" répétés et qui finissent pas se décrédibiliser. A un autre moment, le montage se montre trop lent à faire intervenir le "come back here" du pimp après qu'au plan précédent sa whore ait déserté, ce qui fait que pendant quelques secondes il reste à ne rien faire.
La musique quant à elle, en elle-même, on ne peut rien lui reprocher, elle est cool et c'est le genre qu'on écouterait pour se relaxer, mais justement elle ne va pas du tout avec le contexte. La même apparaît plusieurs fois lorsque nous en revenons au personnage de Frankie après l'avoir momentanément quitté ; heureusement que la bande-son devient plus sombre plus tard.
Evidemment, avec tous les malheurs du monde qui se sont abattus le même jour sur Frankie, il se retrouve complètement déprimé, et le film devient encore un peu plus immoral. Il faut notamment considérer ce paradoxe chez les dealers qui martyrisent leurs clients mais s'en prennent à un personnage dès lors qu'il vole une femme innocente dans la rue, mais surtout Frankie, qui donne raison à son ami qui avait dans l'idée qu'il fallait s'en remettre au vol, et qu'après tout on est mieux en prison.
Le voilà dans une voie sans issue, et il est admirable de voir comme la solution que trouve Frankie à ses problèmes est amenée comme étant la suite logique de ses réflexions, et même comme étant la chose juste à faire ; c'est plutôt malin sur ce coup là de la part du scénariste.

Dommage qu'encore une fois la toute fin vire un peu dans l'excès, ça a failli être grotesque, mais la noirceur bien épaisse du film arrive à ensevelir ce qui aurait pu tout faire rater.
Là encore je ne sais trop que penser du film, mais pour des raisons différentes. Il était déjà peut être un peu trop chargé pour moi, mais évidemment son but est de déranger un minimum. Il y avait aussi de bonnes idées, qui laissent à penser que Buddy Giovinazzo a bien pensé à certains aspects de son scénario, essentiellement concernant les quelques réflexions sur le Vietnam et ce qu'il en reste dans l'esprit de quelqu'un qui l'a vécu, mais d'autres éléments viennent tirer le film vers le bas.
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le 22 août 2011

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Wykydtron IV

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