A lire certaines critiques sur le site, Conclave fait apparemment grincer quelques dents. Celles-là retiennent surtout le simplisme décrété de l'ensemble, tout comme un aspect woke envahissant et asséné tels les bons sentiments de la messe dominicale d'un curé intégriste.
Mais tenir un tel discours ne serait-il pas quelque peu... Simpliste ?
Car à la réflexion, le fait de montrer du doigt de telles tares en dira sans doute plus sur ses contempteurs que sur l'oeuvre elle-même. Car ils oublient tout simplement que Conclave, avant tout, est un thriller animé de manière très convaincante par tous ses codes les plus identifiables. Le masqué avouera qu'il est très loin d'avoir boudé son plaisir, tant la tension est palpable, tant les intrigues de palais, les manipulations et autres tentatives de déstabilisation abondent et rendent l'intrigue captivante.
Un thriller autour d'une élection des plus périlleuses, en forme de huis clos des plus efficaces, animé d'une jolie photographie rendant hommage à toute la majesté des lieux de l'action, tandis que le drame qui se noue, infusé dans la vision que porte le personnage de Ralph Fiennes sur les événements, touche à l'intime et au questionnement, non pas sur la foi, mais plutôt sur les institutions en charge d'en gérer l'héritage et l'influence.
Pas que Conclave se mette à penser, le menton entre le pouce et l'index, dans une pose grandiloquente, mais donne cependant assez de chair à son propos pour convaincre. Et si les plus chagrins vous affirment que le film est de plus manichéens, coincé entre le progressisme en porte-étendard et le traditionalisme réactionnaire forcément pas bien, il apparaît cependant, si l'on est un peu objectif, que chacun des « camps » et des cardinaux qui les incarnent ne ressort pas grandi de la confrontation. Car fausse humilité, ambition dévorante, fièvre de l'instant, positions délétères, tout cela prend possession des âmes, révélant une réalité des plus tristes. En effet, c'est la représentation de l'église catholique qui vacille, confiée à ceux qui ne sont finalement « que » des hommes, avec tout ce que cela comporte de faiblesses et de compromissions.
Le fait que le cardinal Lawrence participe, dans un premier temps malgré lui, à ce théâtre de faux semblants renforce cette impression d'absence de transcendance qui transpire de cette élection en forme de guerre. Mais au delà du microcosme de l'église, le propos de ce Conclave pourrait se transposer presque mot pour mot dans le paysage politique occidental actuel tiraillé par les extrêmes, un progressisme désincarné et la volonté d'orienter un vote tout en essayant de garder sous le tapis quelques vérités embarrassantes.
Conclave, finalement, est à la triste image d'un monde sur le déclin, dont la seule préoccupation est d'essayer de sauvegarder des fondations de plus en plus fragiles et de plus en plus de nature à se tourner vers des ambitions personnelles.
Soit un propos un peu plus riche que ce que certains aigris se plaisent à vous décrire.
De quoi, en tout cas, à la fin de la séance, se demander : « Et Dieu dans tout ça ? »
Behind_the_Mask, grand pope-corn.