Contes cruels de la jeunesse par Alligator
Conte cruel de la jeunesse, rarement un titre n'a aussi bien été porté. C'est l'histoire de deux paumés, jeunes mais perdus dans leur existence et ce qu'ils vont en faire. En révolte adolescente, chacun à sa façon tente de forger sa vie en opposition avec la génération précédente. Le père et surtout la grande soeur de Makoto le soulignent dans le film de manière assez épisodique, en rappel régulier, comme une constante à ne pas oublier, un rappel à l'ordre continuel, une règle qui pèse et qui est là, tapie dans le fond du décor.
Elle, perd ses illusions, sa virginité dans les bras de son homme, malgré sa brutalité, ses violences un peu trop répétées. Elle tente de fuir. Mais à peine esquisse-t-il un mot d'amour qu'elle désarme et aveuglée par les feux de l'amour elle rentre dans le rang. Opposée à la vie du commun, elle n'en demeure pas moins esclave de ses sentiments.
Lui, est bouffé de l'intérieur par la violence qui est en lui. Il ne trouve pas de moyens d'exprimer la violence intérieure qu'en la détournant sur Makoto ou sur d'autres. Fils à Papa, l'étudiant cherche à fuir cette dépendance familiale en se maquant avec sa belle-mère contre argent sonnant et trébuchant.
Il est vite évident que ces deux-là se sont trouvés. Deux plaies. Deux destinées qui sentent le roussi. Sorte de relation dépendance qui se soutient pour mieux se détruire.
La fin est très étrangement dérangeante. On peine à penser qu'Oshima ait pu se commettre à une fin aussi moraliste et démonstrative. Le dernier plan nous dit bien : "regardez bien ce qui vous arrivera si vous n'êtes pas sage!" Du moins est-ce l'impression que j'en ai eu. Sans doute qu'il s'agit là d'un plan caution en quelque sorte, permettant à Oshima de faire valoir ses thématiques.
Les comédiens sont excellents. L'aventure que traversent les personnages qu'ils incarnent ne m'a pas plus ému que cela. Cependant leurs compositions m'ont impressionné. Je réaliste maintenant que l'histoire est d'une modernité étonnante et que le Japon sur bien des points est beaucoup plus précoce en ce début des années 60 que le frileux Occident (avortement, prostitution, émancipation, etc.). Les thématiques abordées sont courageuses et traitées comme il se doit avec tout à la fois élégance et sincérité.