A un touriste américain visitant la France, objectant sans cesse au guide excédé qu'aux 'ils avaient bien mieux chez eux aux US, mais intrigué par un moulin à vent :
- "Qu'est-ce que c'est que ce truc-là" ?
- "Un ventilateur pour le confort des vaches en été. Vous avez ça aussi en Amérique ?"
(...)
Encore que je me demande comment celui que nous montre le grand Alfred avec toutes ses voiles déchirées faisaient pour tourner encore ! Et pourquoi en action sans grain à moudre. ?..
Les hauteurs, le vertige ont toujours fasciné Hitchcock (1899-1980)... ("Vertigo" devenu "Sueurs froides") et bien d'autres...
Ici le sur le toit d'un moulin à vent, depuis le haut de la cathédrale de Westminster, ou encore de l'avion tombant après avoir été touché par la flotte ennemie... les angoisses de chutes sont bien présentes pour augmenter votre taux d'adrénaline...
Etait-ce pour cela qu'il fallait nous faire voyager d'Amérique vers l'Angleterre, puis vers les Pays Bas, avant de revenir aux US, au risque de nous décontenancer ?
En réalité, la majeure partie de ce film fut tournée à Hollywood où Hitchcock s'était exilé avant la seconde guerre mondiale... Il craignait d'ailleurs pour sa famille et ses compatriotes restés à Londres d'où cet hommage appuyé (dans le générique d'introduction) aux correspondants de guerre auxquels ce film est dédié... Une pellicule comme si elle était neuve et cependant sans indication de restauration....
Premier mauvais point : ce film est truffé d'invraisemblances et erreurs mais la vérité des faits n'est pas ce qui comptait le plus aux yeux du réalisateur qui signe ici sa trente sixième réalisation (TV et autres confondus) d'une carrière commencée en 1923... Cinquante trois longs métrages au CV...
Le scénario n'est le point fort de ce récit, pas facile à suivre ni à comprendre non plus...
Pas très surprenant quand on voit le nombre de plumitifs : comme base de départ"Personal History" un livre de Vincent Sheean transcrit par Charles Bennett, Joan Harrison, Ben Hecht et Richard Maibaum certains non crédités...
Hitchcock semble par ailleurs hésiter en permanence entre les deux ambiances qu'il voudrait nous faire partager : la guerre mondiale réelle imminente, la propagande en faveur de l'entrée en guerre des États-Unis contre l'Allemagne d'un côté le crime à résoudre et les investigations journalistiques de l'autre..
Ce qui fit d'ailleurs l'admiration de Goebels à l'époque qui s'y connaissait : jugez plutôt : il était le ministre de la propagande sous Hitler à cette période sombre de l'Histoire...
Regard dans le rétro : un journaliste américain qui se croit viré par son rédac'chef est en réalité envoyé comme émissaire spécial en Europe (au risque d'y laisser sa vie) pour soupeser les craintes d'une généralisation de la guerre... Un vilain dictateur boche et moustachu renie ses traités de paix signés la veille !
Le film étant sorti aux US en 1940 mais seulement en 1948 en France, le suspense qu'ont connu les spectateurs américains ne sera pas le même que sur notre continent où eux connaissaient la triste réalité des faits se terminant par la débâcle allemande...
Lors de son enquête, le journaliste suit la piste d'un homme politique hollandais, signataire d'un traité d'alliance secret, que les nazis veulent connaître à tout prix. ( pour satisfaire aux règles de censure aux USA , le film évite les références directes à l'Allemagne et aux Allemands) Il est tué mais en fait ce n'était qu'un sosie destiné à tromper l'enquête car on le retrouve prisonnier dans un moulin... La suite, vous la découvrirez vous-même...
Pourquoi le nombre 17 ? Je n'ai pas trouvé d'explication mais "Hitch" avait déjà réalisé un film portant le nom de numéro dix-sept : un nombre fétiche pour lui ?
Le démarrage est un peu lent, mais c'est coutumier de l'homme : besoin d'atteindre son second souffle ? Comme d'habitude aussi, la circulation d'une voiture vue de l'intérieur est plus proche d'un traineau glissant sur la neige que des cahots d'un vieux teuf-teuf, avec, déjà, la voiture tournant toute seule.
Ce film donne par ailleurs l'impression de s'éterniser avec beaucoup de plans inutiles ! J'en ai même loupé l'habituel caméo que le grand Alfred nous offre ici après dix minutes de projection... Il lit tranquille son journal dans le hall de l'hôtel du héros de l'aventure...
Le casting n'est pas la qualité principale de ce film... La tête d'affiche (Joel McCrea) est tout juste correcte dans son interprétation mais sans plus, son complément direct féminin (Laraine Day) aussi sexy et amoureuse qu'une autruche devant un cygne, bref, il faut être bon public. pour avaler toutes les couleuvres du réalisateur...
Ca sent le "so-british" et les chichis vieille dentelle, et ce ne sont pas les comédiens qui racoleront les spectateurs...D'ailleurs leur recrutement avait été compliqué : Clark Gable lui-même avait poliment décliné... et regretté bien après... Nous aussi.
On se demande même si le grand Alfred n'était pas fatigué par son film précédent, "Rebecca" dans lequel il avait jeté toutes ses forces ? Et dont l'accueil fut plus réussi.
Car celui-ci reçut un accueil mitigé du public : 1 769 904 spectateurs en 1948 dans les salles françaises : score respectable mais pas suffisant pour franchir la barre des deux millions d'entrées permettant d'accéder à la respectabilité du box d'office de cette époque...
Ce film avait été créé à l'époque de la naissance de Bugs Bunny...
Le dictateur comme une taupe... Mais vous le savez déjà...
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Arte le 28.02.2024- 11.03.2024-