Cosmic Sin n'est pas un film de guerre d'anticipation, ni même un film visionnaire. Dans sa peinture des civilisations aux alentours de l'année 2524 (on aime le sérieux de l'entreprise quant à la précision de la date), où les soldats se propulsent littéralement d'une planète à une une autre à travers les années lumières pour en découdre avec des extraterrestres, le film d'Edward Drake tente d'écrire de nouvelles pages d'une espèce de mythologie sortie de l'imaginaire d'utopiques fous aux idées et ambitions vertigineuses qui, malheureusement à l'écran, relèvent plus d'un modeste double N (nanar & navet) que d'un futur 2001 du streaming. Amazon Prime continue sa petite routine de faire d'un film foncièrement raté un petit évènement "à la une" de son application.
Inutile de s'attarder longtemps sur un Bruce Willis qui traîne la patte comme rarement, tristement absent, héros mort-vivant vêtu d'une armure en plastique pompée sur un mauvais skin d'Halo ou de Mass Effect. Le poids des ans n'est plus que jamais d'actualité. Le plus drôle finalement c'est qu'en dehors de son scénario inepte et embrouillé à force d'être sérieux (il est déconseillé de mêler physique quantique et punch-lines de soldats), les dialogues étant trop souvent là pour nous le rappeler, on s'amuse à comparer les incohérences de cet univers censé se dérouler cinq-cents ans après notre époque. L'introduction ne sera qu'un leurre, les quelques scènes dans l'espace représentant les rares miettes amusantes et spectaculaires à se mettre sous la dent. Sur Terre et de nuit, seule cette ville au loin que l'on devine futuriste avait de quoi nous mettre l'eau à la bouche; malheureusement, Edward Drake ne filmera que des entrepôts, souterrains et couloirs de parking d'hypermarchés parce qu'il manque un bifton ou deux. C'est donc ça, l'année 2524? Les mêmes fringues et les mêmes bagnoles des années 90-2000, les mêmes expressions pourraves ("j'ai une pêche d'enfer")? Quarante ans avant, Ridley Scott avait une toute autre vision de l'avenir.
Il est préférable et plus que conseillé de se marrer des aberrations et de la pauvreté de la direction artistique du film. On ne sait pas réellement si Cosmic Skin est un hommage appuyé aux direct-to-video des années 90 ou aux cut-scenes des récents jeux-vidéos musclés à la mode tant les gimmicks pullulent, mais le manque de moyens à l'écran empêche de prendre son pieds, les soldats préférant tirer dans le vide, filmés bien entendu en plan serré pour limiter les dégâts. Peu de ressenti au niveau des impacts, éloge des corps et des vaisseaux statiques, tout n'est que photogramme plat sans relief manipulé et éclairé par un sérieux fétichiste du fluo et du lens flare obtenus grâce à une app gratuite sur Android. La planète située à plusieurs centaines de milliers d'années lumières de la Terre n'est qu'une simple forêt d'Europe de l'est et on ne verra notre planète que par un simple hangar en taule transformé en bar pour l'occasion. Quelques vagues bruits de robots au loin, un combat ou deux avec des lasers et des halos lumineux, quelques signalétiques vaguement rétro-futuristes et des extraterrestres eux-aussi vêtus de costumes qu'on ne voulait pas sur Mortal Kombat il y a vingt-cinq piges. On finit d'enterrer le bébé en fin de métrage par une pauvre bagarre aux poings et Bruce Willis qui quitte le troquet (ou hangar en taule), littéralement dans l'ombre, donnant au film un petit quelque chose d'aussi mortifère que terrifiant, comme si tout ceci n'était qu'une supercherie qu'il fallait boucler très vite parce que le covid-19 commençait à faire des dégâts sur le plateau et à gangréner l'équipe.