Au début, ça commence bien, avec un très beau travelling circulaire montrant la limousine de Eric Parker, qui veut aller (de manière têtue) chez le coiffeur alors que le monde s'agite autour de lui.
105 minutes plus tard, c'est un voyage interminable qui se finit où l'on ne cesse de penser à la phrase de Woody Allen ; "L'éternité, c'est long, surtout vers la fin".
C'est verbeux, cérébral comme jamais (même Godard ou Bresson sont des modèles de limpidité à côté de ce film), mais surtout, ça emberlificote une histoire qui est au fond très simple, mais qu'on nous sert d'une crème très indigeste ; c'est un homme qui, au fil de sa journée, va se rendre compte qu'il perd tout ce qu'il a, aussi bien du point de vue physique que dans l'immatériel.
Avec une obsession étrange pour la prostate, ce golden boy, d'ailleurs très bien interprété par un Robert Pattison très sobre semble constamment ailleurs, et où il ne sent vraiment chez lui que dans cette limousine, dans laquelle on va rester une grande partie du film.
Le problème, c'est que outre ses dialogues souvent navrants et totalement à côté de la plaque, c'est que c'est d'une lenteur qui fait décrocher plus d'une fois. Alors, je n'ai rien contre la lenteur (Andreï Tarkovski est un génie en la matière), à condition qu'on nous offre du concret, mais là, on n'a rien, que du vent, tout pour dire métaphoriquement que le capitalisme va chuter, que le capitalisme va chuter, que le capitalisme va chuter. Oui, et après ?
Excepté Pattinson et un autre acteur dont je parlerais plus tard, les autres acteurs plus connus sont tous pitoyables, de Juliette Binoche qui joue la superstar de l'adultère en faisant des manières horripilantes, à Mathieu Amalric qui cabotine comme jamais en Nöel Godin anarchiste, et une Samantha Morton méconnaissable (en dix ans, elle a dramatiquement changé) qui va dire à Pattinson des expressions aussi philosophiques que 1+1=11. Bon, j'exagère, mais on n'en est pas loin.
Il y a quelques personnages secondaires intéressants (le coiffeur, le garde du corps, le chauffeur), mais la fin du film voit apparaitre Paul Giamatti, qui se révèle comme toujours vraiment formidable, car il apparait à la fois comme un vrai "adversaire" de Pattinson dans le verbage de comptoir, mais c'est lui qui représente la morale de l'histoire.
Cela dit, dans ce torrent de mauvaises choses, je retiens la mise en scène de Cronenberg, toujours aussi inspirée, et qui arrive à faire des choses formidables dans un endroit aussi exigu qu'une limousine. D'ailleurs, sa thématique du corps est encore présente, car tout comem Viggo Mortensen, il semble se servir du corps de Robert Pattinson pour le faire souffrir gaiement.
Côté B.O., on a droit à une musique discrète, mais à la tonalité assez proche d'un "The Social Network", et encore une fois, je surligne la présence de Paul Giamatti.
Je reconnais que c'est un film difficile à appréhender, mais certainement pas complexe, et je regrette que Cronenberg ait penché cette fois de son côté philosophique, avec cette espèce de gâteau qu'on aurait enduit de tonnes de crèmes chantilly : on en ressort écœuré.