C’est un film saisissant de sécheresse.
On est en 1950 en Corée, c’est le parcours d’une compagnie de 17 hommes qui doit rejoindre la Cote 465 pour se sortir d’un mauvais pas, sur leur route il récupère un sergent tête brulé et son colonel en état végétatif…
Mann annonce tout de suite la couleur avec un carton qui dit en substance « Raconter l’histoire d’un soldat et vous raconterez l’histoire de toutes les guerres », pour le patriotisme il faudra repasser. Mann compose son film de manière totalement abstraite, on pourrait être dans n’importe quel pays à n’importe quelle époque ça n’a aucune importance, pas de discours sur cette guerre ici, mais un portrait d’homme tendu comme un string, il n’y a rien autour d’eux, ils sont seuls en territoire ennemi. Il suffit de voir la séquence d’intro, d’une puissance folle, la caméra va voir successivement chacun des soldats de la compagnie, ils attendent, on ne sait pas quoi, ils sont sur leurs gardes, l’un d’eux au bout de plusieurs minutes d’attentes sera même retrouvé mort, on lui a volé son arme...
Et cette mort qui rode derrière chaque fourré hante le cadre, elle surgit caché dans un arbre et en haut d’une butte, le film n’est que ça.
Chaque pas en avant de la compagnie se fait dans la douleur, qu’on soit vivant ou mort, on perd petit à petit pied avec ce qui nous fait hommes. Il faut rompre avec l’humanité comme le fait le soldat Montana qui n’hésite pas à tirer avant même de voir la tête de l’homme qu’il a en face, survire avant tout. Le Lieutenant Benson ne veut pas de ça mais comprendra vite que si l’on veut avoir une chance, il faut laisser de coter sa morale, constat amer.
SPOILER
Et si dans un dernier mouvement, Montana et Benson s’accorde pour donner les médailles aux morts ce n’est pas par patriotisme, mais juste parce qu’une fois le combat finit, on peut de nouveau laisser une place aux sentiments, redonner un peu d’humanité à une colline devenu tombeau, le temps d’une oraison funèbre, c’est vraiment très beau.