Voilà un film qui sort de l'ordinaire, mêlant plusieurs techniques, à savoir les vieilles bobines familiales, le dessin animé et quelques plans filmés expressément pour ce film. Le résultat est intéressant et les transitions d'une technique à l'autre fonctionnent plutôt bien. Il y a tout de même quelques ratés, je trouve, par rapport à ces fameux plans filmés en plus. Je trouve que la plupart du temps c'est assez poseur et inutile (voir le réalisateur qui regarde sa propre réflexion au travers d'une vitre dans un métro est un brin prétentieux et n'apporte pas grand chose au récit). L'animation m'a fait un peu peur au début, et puis finalement on rentre dedans et ça marche plutôt bien. On est loin des dessins de studio traditionnels, il y a des saccades, mais ça ajoute un charme. J'ai apprécié.

Si la forme m'a convaincu, le fond m'a par contre fortement déplu. Déjà, le gros problème qui est dû à ce médium, c'est la longueur du récit. 75 minutes c'est court pour raconter une vie. Je n'ai pas lu le bouquin, mais j'imagine que ça fait plus de 100 pages, ce qui est totalement différent de 75 minutes ; on peut y raconter beaucoup plus de choses. Enfin, si ça tombe on y rencontre les mêmes problèmes. Toujours est il que beaucoup de choses me semblaient à peine survolées, un peu comme l'adaptation de Persepolis en film qui me semble nettement moins pertinente que la BD, plus riche scénaristiquement parlant. Revenons à Couleur de peau.

Au début j'ai cru vomir avec tous ces bons sentiments et l'absence totale de conflit réel. Puis après 20 minutes (sur 75 je rappelle) un malaise se manifeste enfin, grâce au décalage entre le bonheur véhiculé par la voix off et les quelques tourments montrés à l'image (la mère qui bat son fils). Malheureusement cette ellipse entre ces deux codes narratifs ne sera pas toujours aussi bien exploitée, la voix finissant par illustrer directement l'image. Puis l'auteur ne nous épargne pas les lourdeurs de son récit et autres facilités narratives. La fin en est un parfait exemple qui, grâce à une petit musique à violon donne l'illusion d'une conclusion, alors qu'en fait, il ne fait que répéter le début du film occultant bien des choses. Le spectateur reste alors sur sa faim.

Il ya aussi ce problème lié au genre autobiographique qui est qu'on ne sait pas où on va. Il n'y a pas d'objectif principal à priori si ce n'est la recherche du bonheur. Mais un film demande en général plus que cela. C'est pour ça qu'en général les films biographiques commencent par la fin (le bonhomme meurt et décclare quelque chose qu'il va falloir essayer de comprendre). Il faut tout de même signaler que la BD permet plus de liberté à ce niveau là (il suffit de lire un Chris Ware pour se rendre compte que les codes narratifs ne sont pas les mêmes). Il en résulte donc un récit décousu qui peut aprfois pousser le spectateur vers le sommeil ou l'irritation, c'est selon.

L'adaptation sur le plan formel est donc réussie, et ce avec originalité, mais le récit semble s'y être apauvri en contre partie. C'est un peu dommage mais le film vaut tout de même le coup d'être vu.
Fatpooper
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le 28 juil. 2012

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le 28 juil. 2012

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