Quand l'audace ne paye pas

Peut-être était-il traumatisé par le tournage infernal de "Apocalypse Now", et ses ouragans destructeurs ? Toujours est-il que pour sa réalisation suivante, Francis Ford Coppola décide de tourner intégralement en studio.

ll fait reproduire de manière faste des rues et lieux de Las Vegas. Et il tente d'utiliser un système ambitieux, novateur, et en théorie économique. En effet, l'ensemble sera principalement filmé au steadicam, dans des prises continues qui évoluent au sein des décors dantesques, et le tout sera supervisé non pas en plateau, mais depuis une régie.

Le réalisateur s'entoure également de grands noms. Pour les visuels, le chef opérateur Vittorio Storaro. Pour les musiques (et oui c'est une comédie musicale...), le compositeur Tom Waits. Et même Gene Kelly, qui fut conseiller technique pour une scène de danse ! Qu'est-ce qui peut mal se passer ?

A l'arrivée, ce sera pourtant la douche froide. Coppola s'est une fois de plus montré mégalomane, son système novateur posant beaucoup de soucis aux équipes techniques. Et causant des dérapages budgétaires. Le film sera lâché par son distributeur au dernier moment, et sera un flop monumental en salles (26 millions de dollars de budget, et moins de 700 000 dollars de recettes !). Coppola en perdra son mojo pour un moment, et sera criblé de dettes durant les années 80.

"One From the Heart" méritait-il un tel échec ? Clairement, le film contient plus de défauts que de qualité.

Je ne peux que souligner l'ambition des décors. Ce Las Vegas de studio a un aspect carton-pâte assumé, qui ne plaira pas à tous. Mais il permet quelques scènes audacieuses, et des visuels parfois dingues, éclairages et néons à l'appui. Dans ce qui est évidemment un hommage au dernier acte musical de "Singin' in the Rain".

J'apprécie également l'énergie des comédiens, surtout Raul Julia et Frederic Forrest. Nastassja Kinski ayant un rôle plus court mais remarqué. Par contre je n'en dirai pas autant de Teri Garr, que j'ai trouvé souvent fausse.

Il faut dire qu'elle n'est pas aidé par un scénario superficiel. Entre l'histoire romantique à deux sous, et la mise en scène qui déambule sans vraiment se focaliser sur les émotions des acteurs (se balader en steadicam c'est bien, en abuser c'est mal), on a vraiment du mal à s'attacher aux personnages.

Si bien que les quelques numéros musicaux tombent à plat. Les musiques sans éclat n'aidant pas à les faire briller.

Sans parler de gros ratage, "One From the Heart" est un énorme pétard mouillé, qui coûta très cher à son créateur...