Tout d'abord, pour pallier les justes interrogations qui pourraient fleurir ici ou là, je tiens à préciser que j'ai fait tout ce qu'un homme peut faire pour esquiver ce film.
Aidé au début par une Gizmo encore loyale, j'affrontais la propagande de l'infâme Pruneau avec mes meilleures armes : délicieuses pizzas maisons faites par les blanches mains de Madame, alcools de toutes sortes, Bob et Bobette à foison pour le divin Paul, promesse même de divertissements divers et variés, rien n'y fit. La défection de dernière minute de Gizmo acheva mes dernières défenses qu'un Scritch trop lâche et qu'un Shammo aveuglé avaient déjà mis à mal.
N'écoutant que mon courage, attrapant d'une main mes cigarettes et de l'autre une flasque d'un digestif bien corsé, je me mis à la suite de la cohorte malade qui m'entraînait vers le cauchemar le plus noir de mon existence.
Installé dans l'inconfortable, mais presque vide, salle de mon supplice, je saisissais habilement toute occasion pour éviter l'inéluctable. Le pleutre Scritch fuyait les bandes annonces, je l'accompagnais, le même tentait une tentative d'évasion par les toilettes, je suivais toujours, en vain...
Lorsque la salle devenue obscure commença à balancer les premières images, j'étais bien, malgré moi, assis au fond de mon siège et m'attendant au pire. Nulle sortie à ma gauche, pas d'échappatoire à ma droite, j'étais bel et bien piégé.
L'avantage d'un film qui propose sans second degré de mélanger Western et Aliens, c'est qu'on imagine tout de suite le plus terrifiant, et que, au final, si l'horreur est bien là, elle n'est pas encore aussi effroyable que l'attente qu'on en avait.
Pourtant, dès le début, Daniel Craig nous prouve l'incongruité de sa présence. S'appropriant dans la première scène un chapeau des plus ridicules, il nous démontre qu'il est aussi à l'aise en tenue de westerner que moi en aube de première communiante. Plus tard, comme d'habitude et sans doute par contrat, il se sentira obligé d'exhiber son corps difforme avec toute la virilité d'un athlète Grec de la grande époque...
Paul Dano, abominable, essaie de nous faire croire qu'il est le fils d'Harrisson Ford. Ce dernier se sort tant bien que mal d'un rôle mal écrit qui le fait commencer dans le film par écarteler un pauvre bougre. De tout cela, nous n'avons cure, l'invasion a commencé, Craig a un bracelet magique et les alliances de circonstances vont se nouer...
J'ai tenu presque trois quarts d'heure sans puiser dans mes réserves, parce que l'ambiance était encore au Western, et aussi parce que je savais n'avoir guère de munitions et que le pire était à venir...
Et comme prévu, le pire arriva. Ce moment où plus rien dans le film n'a d'importance, ou le n'importe quoi domine l'ensemble, domine un Sam Rockwell toujours meilleur que ses films, emporte avec lui une Olivia Wilde pathétique de médiocrité, nous soulève d'ennui en désespoir avec la vigueur d'un grabataire asthmatique et nous laisse finalement seul, au bord du chemin, nu et désespéré.
Heureusement, la flasque était là. Généreusement offerte au tout venant, elle se baladait de Pruneau (l'infâme) à Shammo (l'aveugle) en passant par Scritch (le pleutre) qui savait d'ailleurs bien prendre son du à l'aller comme au retour...
Je n'ai aucun problème particulier à faire intervenir des extra-terrestres à une autre époque, au contraire, c'est de la pure logique, et d'autres l'ont fait ailleurs, et mieux. Hélas, ici, tout n'est que prétexte aux scènes les plus convenues, et il faut s'arrêter cinq minutes sur la nature particulièrement abominable de l'extra-terrestre présenté ici.
Lorsque le premier Alien est sorti, le monstre hideux avait une vraie force bavante et vomitive, le problème, c'est que depuis quelques années, il semble impossible d'avoir la moindre originalité en terme de créature. La jurisprudence Cloverfield joue ici à son maximum. Si même le sympathique Super 8 n'y a pas échappé, comment voulez-vous que l'abominable Cowboys contre Aliens s'en détache ? Echec graphique et intellectuel complet, la bestiole est à la fois ridicule, laide et prévisible, et je ne parle même pas des façons grotesques que trouvent certains personnages pour en venir à bout...
Le film, médiocre, se poursuivait. Ayant calculé trop court, et les producteurs trop long, je me trouve bien vite la flasque vide et quelque peu désemparé. Les événements les plus pitoyables s'accumulaient devant l'écran, et je me demandais avec inquiétude quand tout cela finirait...
Heureusement, les pires choses, comme les meilleures, ont toujours une fin, et c'est avec une joie non dissimulée que je sortais de la séance, gourmandant gentiment Gizmo pour son manque de persévérance, bottant délicatement le fessier de l'infâme Pruneau pour sa juste récompense et me trouvant tout couillon à me dire que, finalement, c'était presque moins mauvais que je ne le craignais, je veux dire, partant de très bas, et avec l'aide de la flasque, bien sûr...
La prochaine fois, j'en prendrai deux.