Dès le début du documentaire, Kip Andersen fonde son propos sur un chiffre qu'il tire d'un rapport de la FAO, source officielle, désignant la production animale comme la première cause de bien des maux infligés à notre planète. Le postulat de départ était alors intéressant. Si ce chiffre est d'envergure internationale, toute l'analyse qui suit concernera uniquement les Etats-Unis. C'est en ce sens que le réalisateur manipule bien les chiffres. Il commence par assommer à plusieurs reprises le spectateur avec une multitude de chiffres dans un lapse de temps très court pour, sans doute, démontrer la scientificité de son propos, ce qui le rend très peu compréhensible. Dans le flou des chiffres que Kip Andersen nous expose, à un moment donné, il nous indique la superficie nécessaire pour produire "de façon raisonnée" ("sustainable farm", sans savoir à quoi cela correspond vraiment) , une quantité de viande suffisante, en prenant pour repère la consommation annuelle d'un américain moyen (autant vous dire qu'elle est très élevée). Et cet argument, vous vous en doutez, va l'amener à vous inciter à choisir la voie du veganisme. A quel moment parle-t-on de de consommation raisonnée (en quantité), de production biologique, respectueuse de la souffrance animale, locale et respectueuse du climat ?
Aussi, le réalisateur nous offre un petit couplet sur la puissance du lobby de l'industrie agroalimentaire, rien de nouveau. Mais ça lui permet toutefois de placer son petit quart d'heure héroïque car, fort de ses idées écologistes et face à l'urgence de la situation de notre planète, il ne pourrait plier face à la pression de tels lobbies. Ce n'était pas indispensable à mon sens.
Après avoir démontré plusieurs réalités comme le manque de prise de position des plus grandes organisations de défense de l'environnement, l'existence d'exploitations pratiquant la production intensive, le lien entre la production animale et la déforestation...et en passant par un grain de sensasionnalisme parfois (quand même), le réalisateur en arrive forcément à la solution du veganisme. Le veganisme, parce que quelqu'un qui consomme de la viande aujourd'hui n'est pas un réel défenseur de la cause écologiste.
Personnellement, j'aurais bien aimé voir ce qu'aurait donné ce documentaire s'il était centré sur les chiffres concernant un pays comme l'Inde par exemple, largement moins consommateur de viande. L'enquête serait biaisée me direz-vous. En effet, tout autant qu'elle l'est dans cowspiracy avec des chiffres qui ne concernent que les Etats-Unis. C'est pour cela qu'il nous faudrait une étude globale.
J'aurais bien aimé qu'on fasse des comparaisons avec d'autres modes de consommation, par exemple une consommation locale biologique, en quantité raisonée. Mais visiblement le réalisateur a voulu occulter toutes les autres solutions possibles pour vous apporter sur un plateau d'argent la solution suprême : le veganisme. Cet oubli curieux ne ressemblerait-il pas à de la manipulation ?
C'est dommage, la démarche est sûrement louable, mais le résultat n'y est pas.