En dépit de la similitude au niveau du titre, ce Crimes of the Future n’entretient aucun rapport avec le long-métrage tourné cinquante-deux ans plus tard par Cronenberg. Du moins, aucun rapport en surface, car on sait à quel point le maître de la Nouvelle Chair n’a eu de cesse, au cours de sa longue et passionnante filmographie, d’explorer les mêmes thématiques sous différents aspects. Ici, en l’occurrence, une fascination pour les sécrétions et autres fluides corporels (notamment les moins ragoûtants), ainsi que pour les sexualités déviantes.


A l’instar du diptyque formé par Frissons et Rage !, Crimes of the Future est construit en miroir de sa précédente œuvre, Stereo : on y retrouve le même procédé narratif consistant à superposer une voix-off à des images filmées sans prise de son, ainsi que la même durée globale (une soixantaine de minutes). A la différence que l’esthétique en noir et blanc cède la place à la couleur, et que la dissociation de sens entre ce que le spectateur voit et entend n’est plus imputable au monologue du protagoniste, mais à des bruitages en décalage total avec la diégèse de la scène figurant ses émotions intérieures (le vrombissement d’une moto face à une menace grandissante, les sons stridents et déréglés d’une pulsion réfrénée s’apprêtant à rejaillir à la surface…).


Bien que très maîtrisé sur le plan technique (comme toujours avec Cronenberg), notamment dans sa gestion des cadres et de la profondeur de champ, ce deuxième film n’en reste pas moins aussi difficile à suivre que le premier, ironiquement là encore d’une manière inversée : si Stereo suivait une ligne narrative claire mais nous perdait dans son verbiage incompréhensible, les dialogues de Crimes of the Future se veulent plus accessibles mais on est bien en peine de pouvoir déterminer ce dont parle le scénario, tant l’histoire nous balade d’une scène à l’autre au gré des tribulations kafkaïennes de son personnage principal. L’ensemble est toutefois rendu plus digeste grâce à l’humour absurde et incisif employé par le réalisateur canadien, ainsi qu’à la fascination exercée par l’androgynie mystérieuse de l’acteur Ronald Mlodzik.

Little-John
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