Si Cruising a été si mal reçu à sa sortie c’est évidemment à cause de sa violence physique, mais c’est surtout à cause de sa violence morale, mentale même. Les corps sont mis à rude épreuve dans Cruising, pourtant ce n’est rien à coté l’indécision qui parcoure le film, jamais Friedkin ne lève le mystère, ça pourrait paraitre gênant dans un thriller de ne jamais savoir réellement ce qui se passe, c’est tout l’inverse qui se produit. On n’a aucun renseignement de temporalité, les ellipses sont incertaines, on nous cache parfois même le développement de l’intrigue, finalement le seul curseur c’est Pacino, il faut le voir se décomposer, voir les deux forces qui le tire et l’éloigne du milieu dans lequel il vit depuis un moment. On sent que ce jeux de dupes le détruit, il ne peut plus toucher sa copine, peut être même est attiré par l’autre bord, il y a cette sensation étrange de le voir perdre pied et nous avec. Mais attention malgré cela Friedkin est un homme attaché au genre, il n’oublie donc pas de nous faire en premier lieu un thriller passionnant, terrible et inédit, cette plongée dans le milieu SM gay étant évidemment une première qui lui vaudra les foudres de la communauté en question. Un thriller donc, qui dès sa première séquence tendu et angoissante prend à la gorge pour ne plus nous lâcher, chaque fois que Pacino descend les marches du club, c’est en apnée que l’on suit son enquête, lui qui souhaite obtenir une promotion à l’issu de cette dernière. Pourtant il demandera à son supérieur d’arrêter, il ne peut plus, il ne se sent pas de taille a résister à un univers qui n’est pas le sien, un univers qu’il n’imaginait même pas. Et même quand il rentre chez lui après que l’enquête soit peut être résolut, il ôte ses vêtements de cuir, ses lunettes noires, se rase comme s’il voulait repartir de zéro, faire peau neuve, se laver de ce qu’il avait vécu, mais son regard dans la glace qu’il nous renvoi ne le trompe même pas lui-même, quelque chose s’est perdue.
La violence la plus terrible hantera cet homme pour toujours.
Biniou

Écrit par

Critique lue 784 fois

12
2

D'autres avis sur Cruising - La Chasse

Cruising - La Chasse
SanFelice
8

"you made me do that"

Un polar de William Friedkin, c'est toujours un film que j'attends avec impatience. Après la claque French Connection et la baffe To live and die in L.A. (peut-être par snobisme, mais je me refuse...

le 13 juin 2013

69 j'aime

8

Cruising - La Chasse
Pravda
8

Vous ne regarderez plus jamais le motard des Village People de la même façon

Un film coup de poing qui mettra un frein à la carrière de Friedkin, après les encensés « French Connection » et « L’exorciste », ainsi qu’à celle d’Al Pacino, qui par la suite, le reniera. Le moins...

le 8 févr. 2013

44 j'aime

8

Cruising - La Chasse
Ugly
7

Le monde des "leather boys"

William Friedkin réalise en 1980 un film qui a tendance à être passé inaperçu à l'époque car mal compris par la critique à cause de son sujet trop sordide, son décor de bars gays et son aspect un peu...

Par

le 25 oct. 2018

35 j'aime

16

Du même critique

Rio Bravo
Biniou
10

Critique de Rio Bravo par Biniou

Hum, Rio Bravo de Howard Hawks, qu'est-ce qui fait que j'aime ce film à la folie ? Il n'y a pas 150 raisons, c'est juste une histoire de jubilation. Rio Bravo c'est presque un film à sketches, lié...

le 16 juil. 2012

54 j'aime

18

La vie est belle
Biniou
10

Critique de La vie est belle par Biniou

C'est marrant comme parfois l'on reproche à un film son évidence. Capra est un humaniste (utopiste ?) pur et dur, mais ça ne l'empêche pas d'être réaliste et c'est sans doute grâce à cela que ses...

le 26 mai 2012

39 j'aime

11

Projet X
Biniou
1

Critique de Projet X par Biniou

Le principal argument des personnes défendant ce film est qu’il représenterait une certaine jeunesse, une soit disant génération MTV toujours plus bête et dépravée et qu’il serait à travers cela un...

le 10 févr. 2013

32 j'aime