J'ignore si ce film présente un grand intérêt quand on ne s'intéresse pas au Viêt Nam, vu son rythme haché, ses personnages peu loquaces et les morceaux de poésie longuets qui l'émaillent. En revanche il donne à voir un aspect du pays que le touriste ne percevra probablement pas sur place : la cruauté de l'existence quand on est réduit à accepter la moindre ressource, y compris criminelle. Jusque là ça pourrait encore être romanesque, mais le gang qui sévit dans Hô Chi Minh ville n'a rien des maffieux qui font le charme des films américains. La violence est présente de façon particulièrement crue, doucereuse quand elle est sexuelle, ou au contraire saccadée et presque autiste. On pense aux gamins de "La Cité de Dieu", à "Beat" Takeshi Kitano et à ses explosions d'hémoglobine. Le regard empreint de légèreté qu'y pose le réalisateur permet sinon l'espoir, du moins de supporter ce spectacle pourtant insoutenable. Les acteurs sont admirables, et même si la belle Tran Nu Yen Khe y est malmenée et que je n'aurais pas pu le regarder d'une traite, ce Cyclo a une saveur âpre qui restera un bon souvenir cinématographique.