Lives matter
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le 16 juin 2020
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A l’origine le nouveau film de Spike Lee était censé être projeté au Festival de Cannes, hors compétition. Un joli coup d’éclairage pour le président du jury, et un début de réconciliation entre le Festival et Netflix : une opération gagnante sur le papier. Mais à constater aujourd’hui la qualité de l’œuvre en question, on se demande l’accueil dont il aurait bénéficié, et le profit qu’en auraient tiré les différents partis.
On peine en effet à lister tous les motifs d’embarras face à la dernière réalisation du cinéaste militant. Le premier, déjà bien annoncé dans l’épilogue de BlacKkKkansman, et sans doute le plus honorable, concerne la lourdeur avec laquelle Lee articule son récit et ses motifs d’engagement. Le long prologue d’images d’archives pour expliquer les horreurs de la guerre du Vietnam se diffuse sur tout le film, avec inserts de photographies pour illustrer les héros qu’on évoque, les chansons qu’on chante ou fustiger Trump tous les 3 plans. C’est bien simple, ça m’a fait penser au montage de Lucy. Les discussions semblent sorties d’un plateau de chroniqueurs acerbes, et dérivent vers une assommante leçon de contre histoire, réhabilitant les minorités, glorifiant des figures idéales du passé (le fameux Norm) ou du présent, avec la descendante française expiant les péchés de ses colons d’ancêtres en délogeant les mines anti-personnelles, signes extérieurs d’un pays ravagé par les forces impérialistes.
Comme toujours : la cause est noble, la prise de parole nécessaire, et, à la manière d’un Michael Moore qui ne recule devant aucun procédé lorsqu’il s’agit de toucher le plus grand nombre, on peut imaginer que toutes les armes sont bonnes à prendre au vu de la situation dans laquelle se noie l’actualité du pays de Spike Lee.
Mais tout de même, et si au moins le film se limitait à ces maladresses… Car tout ce qui se brode autour de ce discours est tout bonnement à jeter. On passera sur les références, de l’affiche d’Apocalypse Now à La chevauchée des Walkyries suivant un bateau de touristes, ou aux considérations sur Rambo et Chuck Norris qui, même prises au degré extrême de la parodie, restent affreusement gênantes ; de la même manière, on peine à comprendre si les flash backs en format presque carré et à la photo vintage d’un VHS des années 80 est à prendre comme un manque de talent fauché, un hommage aux films de genre (mais dans ce cas, pourquoi ?) ou un simple désir de contraste avec le présent.
Chasse au trésor censée dégénérer vers le modèle du Trésor de la Sierra Madre, mais qui reste coincé dans le vestibule. A l’image de son récit, Da 5 Bloods avance sur un terrain miné, et fait exploser sa crédibilité à chaque pas : les acteurs jouent mal, l’écriture est atrocement laborieuse (répétition permanentes, entre la paranoïa, les flashbacks, le rapport au fils entre haine et amour), la psychologie digne d’un téléfilm (et que je te pleure dans les bras d’un fantôme venu me pardonner les erreurs qui me hantent, et que maman est morte en me donnant la vie, et que je suis en phase terminale à cause de l’Agent Orange d’il y a 40 ans, tout ça…)et la musique, un affront constant à la capacité du spectateur à s’émouvoir par lui-même. Une abomination qu’on soupçonne, elle aussi, d’être probablement parodique, comme tant d’autres séquences : les rires gras des retrouvailles des vieux compères, la durée des checks, la longueur des poings liés sur une tombe au soleil couchant, les cris de douleurs, les jeux du sort (un lingot trouvé dans le trou creusé pour faire ses besoins : on saluera la conscience écologique de l’aventurier qui préfère enterrer ses déjections par respect pour la jungle profonde), et des serpents, du sang numérique, une absence totale de rythme (le film dure 2h34, grands dieux de l’usine à rêves !), une casquette Make America Great Again, des hugs toujours montrés 2 FOIS au montage, et des lingots pour Black Lives Matter.
Et Jean Reno.
C’en est trop.
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Créée
le 13 juin 2020
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13 commentaires
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