Personne ne peut faire un biopic sur Dali, et certainement pas Quentin Dupieux. Mais lorsque l'on voit l'interprétation mystico-mistique d'Edouard Baer et Jonathan Cohen, alors on se dit que tout est possible. La folie absurde et surréaliste de Salvador Dali peut enfin prendre vie. Exprimer tout un univers venu d'ailleurs.
Cet artiste fou, aux moustaches fières et extravagantes, qui peint ses toiles dans un désert d'idées. Un monde où le temps est une matière élastique qui échappe aux lois de la réalité.
Le sérieux comique d'une image qui s'entrelace de rêve en rêve, de film en film. Que cette petite journaliste, Judith (Anaïs Demoustier) souhaite interviewer. Qu'on traite de boulangère un peu gourde, par ce tyran de producteur, joué par l'excellent Roman Duris. Qui s'obstine à ce rendez-vous sans fin, fondue par l'importance du moment. Une carrière qui démarre extraordinairement fort.
Judith observe la grandeur théâtrale qui marche, dans une sorte d'éternité au mouvement constant. Avec l'air d'un homme extrêmement occupé, qui questionne l'instant, jamais satisfait. Qui trouve cet hôtel immensément laid.
Quand enfin il s'approche, atteint son objectif, et qu'il refuse de parler à un cahier. Demande où sont les caméras, pour qu'elle puisse avoir l'honneur de contempler sa grande tête philosopher sur la déraison qui l'entoure. Flatter son ego.
Et finir par réaliser une interview à peine débutée, déjà terminée. Du grand Dali.
Ce film fonctionne, car il ne cherche aucune réponse, ni d'impulsion éducative. Juste une imitation du style et de la façon dont pouvait penser Dali. Avec des mots rares ou inventés, un langage imaginaire et métaphorique.
Une interprétation du prisme choquant de ses folles révélations, avec par moments une vision étonnante de ses rêves éveillés. Aux couleurs d'un paysage bleu comme le ciel, où les horloges sont molles, et une pluie de chiens morts tombent à travers cette fenêtre. L'élément d'une nature fantasmagorique.
Toutes ces créatures fantastiques, et bien sûr sa muse, la monumentale Gala ( Catherine Schaub-Abkarian ), qui apparaît parfois à ses côtés. Dans quelques-uns des épisodes, joués aussi par Gilles Lellouche, Pio Marmaï et Didier Flamant, avec beaucoup moins de réussite malheureusement.
Avec ce dîner qui n'en finit pas, et ce couloir d'hôtel interminable, en ce charme discret de la bourgeoisie. C'est un voyage cosmique que Quentin Dupieux propose, pour qui veut le prendre. Si c'est le cas, et bien le film est une danse éléphantesque, qui ne cesse de sculpter cette mystérieuse dimension aux pensées délirantes, dans un labyrinthe plein d'incohérences et d'illogismes divers.
Entre comédie, poésie et fantaisie de l'irrationnel. Edouard Baer et Jonathan Cohen démontrent tout leur talent dans une excitation de l'improvisation, guidée et travaillée par la direction du réalisateur.
Daaaaaalí ! offre un pur moment de délire. Une réflexion étrange sur l'art qui rend fou, ou bien l'inverse.