Récompensé par trois Oscars en 2014 dont celui du Meilleur acteur, Dallas Buyers Club de Jean-Marc Vallée nous immerge dans une Amérique des années 1980. Une période où le virus du VIH était l’objet de toutes les interrogations mais encore trop méconnu et entouré de clichés.
A travers l’histoire vraie de Ron Woodroof, un cowboy violent, macho, homophobe, adepte de la drogue et du sexe, le film nous invite à être témoin de cette époque. Après avoir été diagnostiqué séropositif, Ron n’a en effet plus que 30 jours à vivre.
Une double peine
Ron Woodroof va dans un premier temps nier et refuser violemment sa séropositivité. La maladie va avoir de lourdes conséquences sur sa santé. Le personnage s’affaiblit de jour en jour et cela est clairement visible à l’écran. Matthew McConaughey a perdu plus de 20 kilos pour interpréter le rôle et le film mise sur le maquillage pour encore plus de crédibilité. Le texan va aussi connaître un réel mal-être social à cause de sa maladie. Un sentiment d’abandon à l’égard des autorités sanitaires, mais aussi à l’égard de son milieu social. En fait, le sida toucherait uniquement les homosexuels, ce qui provoque l’exclusion de Ron de son cercle social, majoritairement homophobe. Cela traduit ainsi la méconnaissance d’un virus connu de tous, qui atteint aussi les consommateurs de drogue
Le VIH va donc générer une énorme souffrance chez le personnage principal qui ressent de l’impuissance et de la solitude face à la situation. La scène, où il fond en larme, seul, dans sa voiture, en est le symbole.
S’adapter à la maladie
Après un séjour dans un hôpital clandestin mexicain, Ron Woodroof va apprendre à vivre avec la maladie et va même en faire une force. Il va en effet adopter une hygiène de vie irréprochable, arrêter la drogue et créer le « Dallas Buyers Club », un club qui permet aux séropositifs américains de se fournir en médicaments étrangers, non autorisés par la Food and Drug Administration (FDA). Paradoxalement, Ron va devenir de plus en plus lucide avec la maladie et son état de santé va même s’améliorer. L’arrêt de la drogue n’y est pas pour rien.
Ron Woodroof va également avoir une prise de recul sur son milieu social qui l’a rejeté. Il va par exemple s’associer avec Rayon, une séropositive transgenre dont l’interprétation par Jared Leto fut récompensée par l’Oscar du meilleur acteur dans un second rôle. Une relation qui, étonnamment, va se révéler très touchante. Néanmoins, le texan ne renie pas ses origines pour autant. Il aime toujours le rodéo et continu à aider son ami flic avec lequel il est en conflit.
L’évolution du personnage est très réussie car le film ne tombe pas dans la caricature et Ron ne change pas brutalement de comportement. Certes le personnage est plus tolérant mais il reste fidèle à lui-même. La création de son business, pour lutter contre le sida, n’est pas une œuvre de charité, mais bel et bien une organisation lucrative.
Face aux compagnies pharmaceutiques
Les activités de Ron Woodroof aideront de nombreux patients à reprendre un peu d’espoir face à la maladie, mais elles attirent vite l’attention de la FDA. Les autorités sanitaires veulent en effet supprimer toutes alternatives de traitement pour que les patients se dirigent vers leur médicament (AZT). L’intérêt financier prime. Ainsi, de nombreux médicaments testés à l’étranger et qui semblent efficaces, vont être non certifiés voire rendus illégaux.Les autorités sanitaires américaines vont abuser du sentiment de solitude et d’urgence des patients pour administrer et vendre leur médicament à un prix exorbitant. Or l’AZT s’avère très toxique, avec de nombreux effets secondaires s’il n’est pas pris à faible dose. Sans alternative, les patients mourants n’ont rien à perdre en prenant ce médicament, d’autant plus que les procédures pour en certifier des nouveaux sont très longues. Ron n’est pas du genre à se laisser faire et va alors engager une bataille lutter contre les laboratoires et les autorités fédérales.
Comme tout biopic, le destin du protagoniste prend une tournure exceptionnelle. Par son action, cet homme dénonce l’influence des lobbies pharmaceutiques américains et propose une réelle alternative face au virus. Mais à travers le personnage de Ron Woodroof, c’est aussi la vie de milliers de victimes du sida que l’on voit à l’écran.