Dans la maison par NicolasGrosZehe
Agréablement surpris par ce thriller à la sauce française qui réussit à nous hypnotiser et à nous surprendre plus d'une fois. J'avoue n'avoir pas du tout été fan du dernier film de François Ozon, "Potiche", et le titre ainsi que Fabrice Luchini en tête d'affiche ne me donnaient pas du tout envie d'y aller. Mais la bande-annonce intrigante et les acteurs secondaires (Scott Thomas, Seigner, Ménochet) m'ont fait changer d'avis, et à juste titre car j'ai totalement été embarqué par cette histoire étrange, entre réalité et fiction. Un prof de français, désespéré par le niveau médiocre de ses élèves, s'attarde sur le don et le style d'écriture de l'un deux qui a su raconter son week-end passé dans la maison d'un de ses camarades de classe... Rien de spécial n'est raconté mais tout laisse présager une suite, que son professeur va encourager. Au fil des exercices de rédaction, ces visites anodines dans cette maison prennent des tournures différentes jusqu'à ce que l'élève pénètre malicieusement dans l'intimité de cette famille. Mais où s'arrête la réalité? Et où commence la fiction créée par l'imaginaire sans bornes de l'élève? Narré par l'élève, on suit avec engouement les compte-rendu littéraires de ses visites au sein de cette famille de classe moyenne. Le professeur, à la fois admiratif et craintif par les doutes de sa femme (deuxième lectrice de ses copies), l'entraîne et le conseille à diriger son regard pour mieux embarquer le lecteur dans son histoire. Les rédactions s’enchaînent, le récit est représenté en images "comme si c'était vrai", et on assiste à la réaction étonnée des deux lecteurs, le prof et sa femme. Je dis "comme si c'était vrai" car la grande richesse du film se cache en la mise en abyme d'une histoire dans l'histoire du film. Le jeune écrivain, au départ très réaliste, divague et cherche des péripéties pour tenir en haleine et une fin inattendue, si bien qu'on ne distingue pas tout de suite ce qui est vrai et ce qui ne l'est pas. Et ce sont ces passages là qui rendent le film très palpitant, car on veut absolument savoir ce qui va se passer! Entre rêve et réalité, on ne sait plus quoi croire. L'intrusion de scènes plus surréalistes participent à cette confusion : par exemple, lorsque le personnage de Luchini intègre des scènes de narration se passant au sein de la maison, où tous les personnages intègrent un même tableau. Les acteurs sont très convaincants, des plus expérimentés aux plus jeunes. Pour une fois, Luchini ne fait pas des caisses pour épater la galerie, Scott Thomas est juste comme à son habitude et le jeune Ernst Umhauer est à la fois inquiétant (voire effrayant) et innocent. La famille fictive dont se sert le jeune chamboulé est très bien choisie, et on se demande vraiment où son imaginaire va les amener et s'ils vont tous s'en sortir indemnes... Le suspense est modéré par la narration qui compense cet effet, mais qui n'est au final pas indispensable car on se laisse vraiment emporter dans ce supposé délire émotionnel et existentiel d'un jeune lycéen! Pour un scénario français de genre thriller, la qualité est là et c'est un très bon moment à passer.