Ces dernières années, Charlie Sheen est devenu un personnage à part entière. Depuis les Hot Shots qui ont fait sa gloire au début des années 90, ses différents rôles ont travaillé à le rendre plus que célèbre. Les sitcoms Spin City, Two & A Half Men et maintenant Anger Management ; la série des Scary Movie ; même Dans La Peau de John Malkovitch, dans lequel il jouait son propre rôle, tendent à flouter la frontière entre l'acteur et le personnage : celui de Charlie, véritable womanizer, déluré et décroché de la réalité, qui ne vit que pour boire, s'amuser et baizouiller la première fille facile qui passe. Ses récents problèmes juridiques auront d'ailleurs eu pour effet premier que d'étendre sa notoriété et de le faire connaître de ceux qui ne regardent même plus ses séries.

Le retour de Charlie Sheen sur grand écran était assez surprenant. On pourrait se demander quel réalisateur / producteur pourrait encore avoir envie de travailler avec lui. Le fait que Roman Coppola soit derrière la caméra, au delà de rassurer le spectateur méfiant qui sait alors qu'il n'aura pas affaire à un film" classique", permet de comprendre un peu : rappelons que Papa Coppola avait embauché Papa Sheen il y a 40 ans dans un petit film appelé Apoclypse Now. En y ajoutant à ça les participations de Bill Murray et Jason Schwartzman, et la lumière se fait : nous sommes face à un film de potes.

Le problème des films qui se font entre copains, c'est qu'il est parfois très difficile d'entrer dans les délires et les private jokes du groupe. Cela dit, on est loin ici des Bronzés et Petits Mouchoirs. Avec ce film, on se retrouve avec un petit délire décalé tournant autour de de Charles 'Charlie' Swan, graphiste talentueux et paumé après que sa petite amie slave de vingt ans sa cadette l'ait plaqué violemment. Comme le titre et l'affiche le montrent assez bien, nous plongeons donc dans l'univers psychique très personnel de Charlie, à base de scrapbooking pop, de course-poursuites avec les indien(ne)s et autres délires visuels du genre.

Malheureusement, Roman Coppola, aussi imaginatif soit-il, n'a pas le talent de Wes Anderson (pour qui il coécrit régulièrement) pour mettre en place des intrigues aussi décalées que prenantes. Car là où l'on reconnaît le style d'Anderson, on regrette son manque de structure et son talent pour créer des personnages auxquels on s'attache. Charlie Sheen n'apporte malheureusement plus que sa dégaine de mec déglingué par trop de fêtes (et alcool et drogues etc.) et n'apporte d'émotion et de tendresse qu'en de trop rares occasions. Il en résulte malgré tout de très jolies scènes, comme la déclaration finale de Charlie à son amour perdu Ivana. À côté de ça, celui qui est censé être un talentueux graphiste à l'imagination aussi fertile que décalée souffre d'un vrai manque d'originalité. Ses délires internes font triste mine quant on a pu s'habituer aux films de Michel Gondry. Roman Coppola devrait revoir son dico de La Science des Rêves : à côté, ses propres aventures fantasmées à base d'indiennes sexy ou d'agent secrets anti-mec sont bien fades et presque machistes.

Ni très doué dans l'émotion (la faute à Sheen, qui en s'auto-parodiant, n'aide pas à mettre en place une empathie digne de ce nom), ni vraiment assez déluré pour maintenir une vraie fascination, le film vaut finalement surtout pour son esthétique joliment travaillée. Avec les quelques scènes réussies, la volonté de proposer quelque chose de différent et le plaisir de revoir certaines têtes (Patricia Arquette entre autres), le film réussit à être parfois sympathique. À côté, les délires de Jason Schwartzman - en roue libre - et de Bill Murray, plus touchant que le héros (c'est triste), tombent à plat, comme s'ils faisaient suite à un gros délire de soirée bien arrosée. De notre côté, malheureusement, on se tape juste la gueule de bois.
GauthierM
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le 17 juin 2013

Modifiée

le 17 juin 2013

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GauthierM

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