Vincenzo Natali est obsédé par la notion d'enfermement au coeur d'un labyrinthe et de ses conséquences sur la psyché humaine . Ce thème est récurrent dans sa filmographie à travers des films comme Cube, Nothing ou pour le coup un labyrinthe mental dans Cypher. Il n'est pas étonnant donc de le voir s'attaquer à une nouvelle conjointement écrite par Stephen King et son fils Joe Hill qui parle d'un groupe de personnes perdues au millieu de champ constitués d'hautes herbes prenant rapidement une dimension fantastique.
On a bien entendu ici des obsessions kingiennes habituelles également comme un objet du quotidien (ici un simple champ d'herbes hautes) devenant menaçant et inspirant l'horreur et à qui King octroie une forme de conscience malfaisante, des personnages confrontés à leur part d'ombre, une présence fantastique renvoyant à une sorte d'horreur cosmique héritée de Lovecraft au centre du récit (ici la pierre noire littéralement au centre du champ), la foi en une entité supérieure source de folie,... Bref, du King classique.
Et tout celà commençait très bien, tant Natali parvient à travers sa réalisation à transmettre l'angoisse et la désorientation des protagonistes ainsi que le gigantisme de ce labyrinthe vert distordant la réalité et les dimensions physiques comme temporelles dans la première partie du métrage. Il y a également un vrai savoir faire dans la manière dont est présenté le rocher noir qui se tient tel un grand ancien de Lovecraft au coeur du champ et du récit .
Avec peu d'effets, on ressent la presence malfaisante et inhumaine de l'environnement.
Malheureusement, la seconde partie du métrage se perd à force de vouloir en faire trop et de multiplier les retournements de situations et les trames temporelles, éloignant par trop le récit de la simplicité de ses prémisses.
Tout celà est assez dommage et gâche un récit qui aurait pu s'inscrire bien mieux dans une anthologie d'horreur ou de fantastique du type Twilight Zone qu'en cherchant à l'étirer de manière un peu trop articicielle sur la durée d'un long métrage.
Autre petit regret personnel pour le fan de King que je suis, c'est de ne pas avoir eu l'occasion de lire la nouvelle de King et Hill avant d'avoir vu le film de Natali. Je suis certain que la dimension psychologique des personnages y a reçu un meilleur traitement (une des forces du maître de Bangor), et que le récit ne s'embarasse pas de toutes ces circonvolutions de l'intrigue , mais va bien plus à l'essentiel.
De plus la fin du métrage en forme de happy-end (très relatif) me semble être en porte à faux avec l'ambiance voulue dans le reste du récit, et me laisse à penser que la fin envisagée par la famille King tenait plus de The Mist que de celle proposée ici.
En conclusion,malgré des premisses séduisantes et les qualités et l'implication évidentes de Vincenzo Natali à travers sa réalisation, In the Tall Grass s'avère décevant mais donne tout de même envie de revisiter la nouvelle dont il s'est inspiré pour le fan de King que je suis.