« Dans Paris » est un film bien ancré dans notre époque qui ne néglige pas pour autant le regard sur un passé perdu dont la modernité frappe encore… Dans son troisième film, Christophe Honoré nous offre une introduction aussi originale que malicieuse, de belles et grandes scènes d’émotions de jubilatoires éclats de rire, des références à ses mentors qui ont réussi des films qui lui donnent l’envie de perpétuer ce type de cinéma. Superficiel et léger, tout en se gardant une vraie profondeur, Voilà tout ce que l’on y trouve.
L’histoire, des plus simplistes offre à Honoré les moyens de faire exploser son talent. Ses cadrages savamment calculés et percutant dans l’articulation de la vie de ces deux frères, nous donnent un vraie leçon de cinéma. Par son originalité d’une part car il possède le don de les faire exister sans artifices. Par ses références également, on oscille entre Godard et Truffaut, deux frères de cinéma également. Comme eux, l’un est sombre et trop existentiel, l’autre cache sa gravité derrière une apparente insouciance. Et quand il s’agit de parler vraiment d’amour, c’est à Jacques Demy qu’il fait appel avec une conversation téléphonique chantée qui nous laisse au bord de la crise de larme.
Il réussit un film grisant, insolent et touchant d’une simplicité tellement régénératrice. Un film comme l’on en avait pas vu depuis des années. On s’y trouve tellement bien que lorsque le générique de fin vous frappe, on enrage de devoir quitter ce petit univers, tant on aurait en savoir plus encore sur eux.
Quant aux acteurs… Ils sont hallucinants ! Un Romain Duris à contre emploi, intériorisé et noir, il joue à l’état brut. Louis Garrel, en Antoine Doinel des années 2000 se balade en funambule mi-ange, mi-démon. Tous les deux sont à leur zénith et entrent avec maturité dans la promesse d’une carrière exceptionnelle. Et s’il fallait encore souligner une référence à la nouvelle vague, c’est en Guy Marchand et Marie-France Pisier qu’il faut se tourner. Lui en vieux papa poule un peu largué mais si tendre. Elle que l’on a plaisir à revoir enfin sur grand écran, qui l’espace d’une scène donne l’impression de faire revenir le personnage de Colette dans « Baisers volés » quarante ans après, toujours aussi sensuelle et gentiment crispante.
Loin de l’académisme ou du didactisme trop couru cette année à Cannes, « Dans Paris » s’impose comme le film le plus original et incontournable du Festival 2006.