Cette version longue de Daredevil répare les errances, les gros problèmes de rythme et les nombreux dysfonctionnements de la version cinéma du film. Mais, on ne va pas se leurrer le film ne devient pas un chef d'œuvre, loin de là mais il devient honnête, voir bon et il permet surtout de voir ce que Mark Steven Johnson voulait faire à la base. C'est à dire une œuvre beaucoup trop ambitieuse pour son propre bien.
Cette demi heure supplémentaire remet en surface le personnage de Matt Murdock, le centre de gravité du film redevient cet avocat aveugle meurtri par la mort de son père dans son enfance et sa volonté d'exercé la justice sur scène (entendez-là les tribunaux) et hors scène dans son costume du casse-cou. Ce temps supplémentaire permet au spectateur de mieux comprendre le personnage de Murdock et sa colère presque primitive et glauque dans certaines scènes (notamment son pétage de plomb dans la scène de la cage d'escalier contre un homme de main du Caïd).
En effet, la figure de Daredevil est ici radicale, à mi-chemin entre le héros et l'anti-héros, à l'aura plus "sombre" que n'importe quel "Dark Knight". Le réalisateur s'est grandement inspiré de l'ambiance macabre de l'arc Sous l'aile du Diable, écrite par l'ami de Ben Affleck, Kevin Smith (qui a un petit rôle dans le métrage). Un choix qui n'est pas anodin j'y reviendrais.
Par conséquent, cette remise en avant de l'avocat permet le développement de tout un pan du scénario avec un client qui est accusé à tort d'un meurtre, cela permet deux choses fondamentales: épaissir le récit de manière plutôt pertinente et permettre à Ben Affleck de diversifié son jeu d'acteur.
En dehors de ces ajouts extrêmement bienvenus, cette version opère également quelques coupes nécessaires notamment la scène d'amour au coin du feu sauce soap de Matt Murdock et Elektra. Ces coupes permettent un recentrage du récit sur la persona de Daredevil mais le film va quand même partir dans tous les sens.
Après l'avoir revu, ce qui saute aux yeux c'est la trop grande ambition du film, en effet le réalisateur à incorporé des éléments de nombreux récits du justicier aveugle, quitte à crée un surtout, les deux influences criantes sont le Born Again de Frank Miller et Sous l'aile du Diable de Smith. Ils ont voulus mettre tous les éléments qui ont fait la légende du personnage, ses origines, sa renaissance, sa mère qui est dans un couvent, Ben Urich, sa confrontation avec le Caïd, son amour pour Elektra, et enfin le meurtre d'Elektra par Bullseye. Tous ses éléments calés en l'espace de seulement 2h30 se tire la bourre et sont beaucoup trop nombreux pour être bien développés, le récit aurait du être réduit au Caïd avec une introduction d'Elektra et de Bullseye dans un second volet.
Il est évident que Mark Steven Johnson a voulut faire une sorte de best-of du personnage, a trop vouloir en faire, il a fragilisé les nombreux éléments du film.
Il en reste, un film qui a compris le personnage et l'univers qu'il adapte, le pari d'adapté à l'écran ce personnage si singulier est réussit que ce soit esthétiquement, avec un costume génial et crédible (sur ce point, beaucoup mieux que celui de la série TV), ou au niveau de sa psyché, les démons de Matt Murdock sont clairement affichés et bien mis en valeur pour explosé à l'écran.
Malgré les nombreuses critiques disproportionnés qu'a reçut le film (un peu comme le Hulk d'Ang Lee sortie la même année) des moments de bravoures et très bonnes scènes en ressortent: l'attaque du bar des bikers qui montre toute la brutalité dont peut faire preuve Daredevil, le dernier match de boxe de son père et tout ce qui s'en suit, ou encore la confrontation finale avec le Caïd. De plus, des trouvailles visuelles sont là et elles fonctionnent, la manière dont sont représentés les pouvoirs du protagoniste permet de montré visuellement et de manière logique une représentation extraordinaire, des vraies idées de mise en scène sont donc présentes ce à ce niveau-là.
Ces bonnes scènes existent aussi grâce à un casting de bonne facture, bien qu'imparfait, Ben Affleck quoi qu'on en dise à totalement compris le personnage et la distinction entre son incarnation de Matt Murdock et celle de Daredevil est réelle, le Bullseye de Colin Farrell tout en cabotinage fonctionne très bien en second couteau aux cotés de l'excellent Caïd campé par feu Michael Clark Johnson. Une incarnation moderne, tout en exagération et en brutalité exprimant très bien la puissance iconique de ce personnage classique. Le combat final sous l'eau est géniale à ce propos. Jennifer Garner est peut-être le maillon faible de ce casting, mais cela vient plus encore une fois du trop grand nombre de personnage, elle n'a pas la place de se développé, hormis cela l'actrice s'en sort plutôt bien.
Finalement, le film Daredevil mérite d'être vu ou revu dans sa version director's cut, vous y découvrirez un film plein de bonnes volontés, pas toutes bien exécutés mais certainement avec aussi de nombreux éléments qui joue en sa faveur et qui remet en question la ridicule disproportion de haine et de mépris dont il fait l'objet encore aujourd'hui. Tout comme le Hulk d'Ang Lee, Daredevil représente cette frange de films moyens-bons fait à une époque ou des expérimentations étaient encore possible dans le genre du comic-book au cinéma, avant que ce dernier devienne hégémonique dans le tout Hollywood.
En fin de compte, il y a plus de cinéma dans ces films que dans n'importe quel porte étendard à 1 milliard de Disney.