Après le génial Gone Girl de Fincher l'année dernière, voilà sur nos écrans une nouvelle adaptation cinématographique d'un roman de Gillian Flynn mais cette fois-ci, cette adaptation est dans les mains d'un réalisateur français au talent hésitant. Gilles Paquet-Brenner est à la fois le scénariste et le réalisateur du film, et malgré ses influences évidentes il n'a ni le talent ni l'inventivité des cinéastes dont il s'inspire livrant au final un film assez insipide.
Scénaristiquement le film se montre bancal et prévisible néanmoins on retrouve bien le style d'écriture de Flynn. Que ce soit dans ses thématiques ou le type de personnages qu'elle dépeint, soit masculins donc victimes du sort et de leurs stupidités mais profondément moraux soit les personnages féminins, légèrement outsiders et très réfléchis mais aussi parfois carrément cinglées. D'ailleurs beaucoup d'éléments déjà vu dans Gone Girl reviennent ici notamment dans un des personnages qui renvoi à celui d'Amy mais de manière légèrement différente sinon le film se part d'un manichéisme assez rebutant qui aurait pu être évité surtout dans l'exposition très caricatural des "méchants". On se retrouve donc devant une écriture très surannée qui nous renvoie dans les thrillers des années 90 avec le dernier acte grandiloquent aux rebondissements improbables et quelques peu absurdes. Ce qui fait que le film sera psychologiquement moins intéressant que prévu et qu'il ne décolle jamais surtout avec un climax relativement paresseux et mou. Après dans son écriture le film se verra aussi moins ludique que ne l'étant Gone Girl car là où le procédé du journal intime proposait un habile jeu de piste, ici l'utilisation systématique de la voix off est inutile et n'est qu'une facilité scénaristique, chose dont abuse le scénario d'ailleurs prenant parfois trop de raccourcis. D'ailleurs dans cette optique les flash-backs finissent par prendre plus de place que le présent dans le récit au point de devenir le plus intéressant du film, au final tout ce qui se passe dans le présent se révèle inutile, que ce soit les personnages ou leurs quêtes de vérité car au final même si ils n'avaient rien fait la vérité aurait éclater au grand jour, leurs actions n'ont aucunes incidences ce qui fait que cette histoire est très vaine au final. On ne s'intéressera donc pas à Libby et son parcours, elle est bien trop détaché de cette histoire pour que l'on s'intéresse à ses états d'âmes et on sera plus intéressé par le parcours de sa mère et de son frère dans le passé. Même si tout ce qui se passe dans le passé est prévisible en raison d'une utilisation trop évidente du set up/pay-off, le parcours psychologique des personnages se montre plus pertinents grâce à une habile exploitation des faux-semblants livrant une histoire moins sombre que prévu mais plus touchante et tragique. Donc au final le film n'accomplit rien car les personnages n'ont aucunes incidences sur le récit et que les situations se résolvent toutes seules, le film se montre bien huilé et se suit avec facilité et sans ennui mais on ne s'implique pas dans l'histoire et on ne s'attache pas aux protagonistes malgré certains aspects intéressants de leurs personnalités, ce qui se révèle relativement dommage.
Pour le casting c'est plutôt bon même si au final la moitié du casting ne sert à rien, Charlize Theron fait le strict minimum et ne s'impose que par son charme, au final son personnage n'est que témoin des événements et pas acteur ce qui fait qu'elle reste détaché du récit et se montre inutile tout comme Nicholas Hoult qui ne sert strictement à rien, déjà il joue pas spécialement bien, en faite il a tellement peu à faire qu'il ne joue pas, il fait acte de présence à quelques scènes et c'est tout. Seul Corey Stoll dans la partie présent à un intérêt et l'acteur joue son personnage avec justesse. Sinon pour les personnages du passé ce sera plus intéressant d'ailleurs la promo du film aurait du se faire sur eux car au final ils ont bien plus de présence et de développement que Charlize Theron. Même si Chloë Grace Moretz joue un peu le même archétype de personnage dont elle à l'habitude et qu'elle ne renouvelle pas sa prestation, elle reste doué dans ce registre. Par contre Christina Hendricks et Tye Sheridan sont ceux qui tiennent vraiment le film sur leurs épaules, elle se montre touchante en mère désespéré au destin tragique trouvant une belle justesse de jeu pleine d’intériorisation et de grâce et lui change quelques peu de registre dans un rôle de laisser pour compte s'enfermant dans le satanisme. Il offre une prestation inspirée et intériorisée où on peut ressentir ses doutes et sa colère mais aussi sa bonté grâce à une vraie force du regard, il confirme qu'il est vraiment un très bon acteur et un des plus intéressant de sa génération.
Pour ce qui est de la réalisation la photographie est plutôt bonne, le montage maîtrisé avec des Flash-backs bien placé et les musiques sont discrètes et ne servent qu'à accompagner le film, pas le magnifier. Sinon la mise en scène de Gilles Paquet-Brenner s'inspire de Fincher et de Villeneuve principalement mais elle n'en a pas la force ou l'ingéniosité. L'ensemble se révèle propre et maîtrisé mais c'est aussi assez fade surtout que parfois il use de choix esthétiques assez douteux comme cette intro en vue subjective et en noir et blanc qui d'un point de vue formel ne se justifie pas et dénote avec le reste du film étant au final un choix très gratuit ayant pour seul but de faire de l'esbroufe.
En conclusion Dark Places est un film moyen, l'intrigue se suit mais ne passionne pas, les personnages n'ont que très peu d'intérêt mais l'ensemble se montre efficace. On est loin des meilleurs films du genre et celui-ci fini par être insignifiant, un film pas assez honteux pour que l'on considère comme mauvais mais pas assez exaltant pour qu'il soit bon. Juste un divertissement du samedi soir comme un autre qui finit par être oublié aussitôt il a été vu.