Dark Shadows de Tim Burton : la mort lui va si bien ?

En Juillet 2007, Warner Bros. acquiert les droits du soap gothique Dark Shadows créé par Dan Curtis, inédit en France et diffusé sur ABC de 1966 à 1971 aux Etats-Unis. Plus de 1000 épisodes au compteur, d'abord diffusés en noir et blanc puis en couleur, relatent les mésaventures fantastiques de la famille Collins, vivant dans l'immense et sinistre demeure de Collinwood, et dont l'un des principaux membres n'est autre que le redoutable vampire Barnabas. Tim Burton se charge ainsi d'adapter sur grand écran la série originale. Tandis que l'écriture du film échoue à Seth Grahame-Smith, scénariste du prochain Abraham Lincoln, chasseur de vampires, Burton confie naturellement le rôle du vampire Barnabas à son acteur fétiche Johnny Depp. C'est l'occasion pour le comédien de déployer une nouvelle fois ses talents de transformiste et pour Tim Burton d'intégrer enfin à son cinéma la figure éternelle du vampire.

Dark Shadows n'attendait plus que Tim Burton pour revenir à la vie, tant le réalisateur de Batman et d'Edward aux mains d'argent nage comme un poisson dans l'eau dans l'univers gothico-fantastique et délicieusement kitsch de la série des années 60. Entre lyrisme et noirceur romantique, l'ouverture et la conclusion du film, portées par la partition télébreuse de Danny Elfman, ravieront les fans du cinéaste qui retroueveront ici le souffle épique d'un Sleepy Hollow. C'est un retour en territoire connu pour le public et pour Burton, dont la fantaisie et la théâtralité irréelle de Dark Shadows renvoient tour à tour au fantasque et endiablé Beetlejuice et à la poésie désespérée d'Edward aux mains d'Argent.

Le réveil de Barnabas Collins, un vampire du XVIIIe siècle, deux cents ans plus tard en 1972, offre son lot de situations décalées comme celle où Barnabas croit voir dans le M de McDonalds la marque du démon Mephisto, ou celle de sa rencontre avec un groupe de hippies complètements stone. Ces anachronismes ne sont pas sans rappeler le choc temporel des Visiteurs avec Jean Reno et Christian Clavier heurtés par un sarrazin dans une chariotte du diable, en réalité un facteur dans une voiture jaune de la Poste (Voir ici). A voir aussi la rencontre improbable entre Barnabas et le chanteur de hard-rock Alice Cooper, que le vampire confond avec une femme en raison de sa chevelure proéminente.

Mais l'humour de Dark Shadows aussi mordant soit-il a vite fait de nous laisser sur notre faim. Avec un fort sentiment général de déjà-vu, ses tunnels de dialogues et sa multitude de personnages secondaires sous-exploités, les enfants Collins en tête, Chloë Moretz et Gully McGrath, Dark Shadows est condamné à rester dans l'ombre de ses prédecesseurs. Mal dosé, l'humour parodique du film a vite fait de sombrer dans l'outrance et le ridicule à l'image du symptomatique climax hystéro-foutraque dans la demeure des Collins transformée en immense champ de bataille. (Attention Spoiler) Entre la transformation surprise de Chloë Moretz en loup-garou qu'on dirait tout droit sortie d'un mauvais épisode de True Blood, Michelle Pfeiffer jouant du shotgun sur une sorcière comme Sarah Connor face au T1000 dans Terminator 2, ou encore Eva Green, blonde sexy encore plus cinglée que les trois Sorcières d'Eastwick réunies, on frôle l'indigestion... Au petit jeu cruel des comparaisons, à la famille Collins, on préférera La Famille Addams, à qui la mort lui va décidemment mieux sur grand écran...
Cinextreme
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le 20 mai 2012

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