Tim Burton en demi-teinte

Tim Burton, Johnny Depp, Eva Green, une ambiance gothique et Alice Cooper en guest-star... Sur le papier, Dark Shadows avait tout pour être une petite pépite excentrique, un savoureux mélange de grotesque et de macabre. Et pourtant, le film ressemble plus à un vampire en manque d'hémoglobine : il a du style, mais il manque de mordant.

Un Burton en pilotage automatique ?

Depuis Sweeney Todd, Tim Burton semble coincé dans un cycle où l’esthétique prime sur la substance. Dark Shadows en est le parfait exemple : visuellement, c’est du grand Burton, avec ce kitsch gothique assumé, des décors somptueux et une lumière travaillée. Les fans du réalisateur retrouveront son amour des tons bleutés, des ombres ciselées et des figures décadentes. Mais là où le film peine, c’est dans son ton, trop hésitant entre comédie grinçante et romance un peu niaise. Dark Shadows veut être une satire mordante, un hommage aux soap-opéras gothiques des années 60, mais finit par se perdre dans un équilibre bancal où ni l’humour ni le drame ne prennent vraiment le dessus.

Johnny Depp en vampire old-school, Eva Green en sorcière incendiaire

Si le film évite de sombrer dans l’oubli, c’est en grande partie grâce à son casting. Johnny Depp, fidèle muse de Burton, campe un Barnabas Collins flegmatique et décalé, un vampire sorti d’une tombe du XVIIIe siècle et catapulté dans l’Amérique kitsch des seventies. Ses réactions face à la modernité sont souvent savoureuses. Face à lui, Eva Green est tout simplement sensationnelle en sorcière blonde vénéneuse, dévorée par un amour obsessionnel et destructeur. Elle insuffle au film une énergie cruelle et sensuelle qui tranche avec le reste du casting, plus effacé. Helena Bonham Carter, quant à elle, fait du Helena Bonham Carter.

Une BO et des fulgurances qui sauvent le naufrage

S’il y a bien un aspect où Dark Shadows fait mouche, c’est dans sa bande-son. Danny Elfman livre une partition efficace, et les morceaux rock des seventies viennent doper l’ambiance. Mention spéciale à la présence du véritable Alice Cooper, qui offre une scène aussi jubilatoire qu’absurde.

Mais au-delà de ces instants de grâce, le film peine à captiver sur la longueur. Trop de romance clichée, pas assez de véritable noirceur burtonienne, et un scénario qui, à force de vouloir mélanger les genres, finit par se diluer.

Du sang mais pas d’âme

Dark Shadows est une démonstration de style, un bel emballage visuel et musical qui, hélas, manque d’une véritable âme. Les fans de Burton y trouveront leur compte pour le pur plaisir des yeux et pour quelques éclats de comédie portés par Depp et Green. Mais pour ceux qui attendent un retour du grand Burton, celui de Beetlejuice ou d’Edward aux mains d’argent, ce sera une déception.

Un film qui aurait mérité un pieu en plein cœur pour être vraiment inoubliable.