La fin est proche. Giger marche au ralenti et parle encore plus lentement, il ne survivra d’ailleurs pas bien longtemps après la fin du tournage. L’artiste erre dans sa maison si remplie de tableaux et de livres qu’on n’en voit pas un centimètre carré de mur. Tout un aréopage d’assistants et d’amis s’affaire autour de lui pour maintenir l’œuvre d’un homme prêt à s’effondrer.
Dans ce cortège, toutes les femmes sont ses exs et les hommes l’observent et l’accompagnent avec des yeux débordants de respect. Les amateurs de metal extrême y découvriront Tom G Warrior (Celtic Frost, Tryptikon) en fidèle assistant, devenu lui-même une légende mais ne pouvant retenir ses larmes quand Giger lui souffle un compliment.
Entre le quotidien d’un monstre sacré du graphisme et une rétrospective de sa vie, Dark Star se déplace tout aussi lentement que son sujet et dévoile une atmosphère incroyablement touchante. Au milieu des centaines de monstres et de phallus anthropomorphes, un petit groupe se serre les coudes pour faire vivre comme d’honnêtes artisans une machine de guerre visuelle qui a conquis le monde au point de rapporter un oscar.
La statuette dorée apparait brièvement à l’écran, engoncée sans ostentation dans une étagère pleine à craquée. La collection de crânes humains de Giger trône non loin de là, et c’est sur celle-ci que s’ouvre le documentaire. L’artiste en sort précautionneusement son premier exemplaire, offert par son père quand il avait six ans. Le mystère Giger se fait alors un peu plus clair.