Days est l’un de ces films invitant à s’asseoir dans une salle de cinéma pour contempler la monotonie des jours, écouter les sons de la vie et le silence de l’homme pour mieux apprécier ce qui nous entoure.
Tsai Ming Liang, artiste et cinéaste moderne, propose un modèle cinématographique rare à l’ère où le 7ème art subit une influence américaine imposante. Ces films déjà vus et redondants dominent une grande partie du cinéma ne laissant qu’une petite place à la nouveauté contemporaine. Un art de la lenteur, voici ce que Days représente. Un montage délicat avec un agencement de plans fixes, uniques dans leur composition ; caméra posée, les scènes sont animées par seulement deux acteurs et leur environnement quotidien. La structure reste cependant étonnante. Le réalisateur propose des séquences plus ou moins longues, respectant son rythme ainsi que celui de ses acteurs. Une œuvre qui, grâce à cette faculté, invite le spectateur à prendre un temps de répit et de sérénité. La parole se fait rare, voire absente. Seuls les bruits de la pluie, de l’eau, du vent, de la ville, ainsi que le silence d’un mur se font écouter. Tsai Ming Liang retranscrit un réalisme éclatant. Sans transformer la nature des choses par des exagérations qui en deviennent illusoires, il réussit à montrer en toute simplicité des actions quotidiennes, comme la préparation d’un repas. Oser, c’est faire ce film, oser c’est entrer dans la lenteur du film, se laisser prendre par ce rythme progressivement entraînant.
Derrière ce calme résonnant, une histoire se met en place ; celle de deux hommes. A la fois opposés dans leur quotidien mais aussi liés par leur solitude ou encore leur sexualité. Kang et Non (Lee Kang Sheng et Anong Houngheuangsy) ont, tous deux, un train de vie différent. Après plus de la moitié du film, ils se retrouvent, dans une chambre d’hôtel pour une séance de massage érotique. Plus tard dans le film, l’auditoire découvre que derrière cette scène de prostitution une scène d’amour se cache. La fabuleuse mise en scène établit une distinction entre l’avant et l’après rencontre. Une habile transition de l’affairement au calme en passant par l’excitation. Le public assiste à la transformation de ces deux personnages. Tsai Ming Liang installe délicatement cette histoire en laissant, dans le silence de la parole et dans les sons de la vie, le spectateur réfléchir.