Quel titre étrange, qui interpelle dès qu’on l’entend, comme le cinéma d’Audiard qui poursuit son exploration de ses personnages en marge. Un chemin, une filmographie qu’il se construit lentement mais surement, à coups de films souvent bouleversants pour nos certitudes et nos idées toutes faites. Jaqcues Audiard a débuté le cinéma avec un nom, surement lourd à porter, il s’est maintenant fait un prénom que son père, d’où il est, ne regrettera pas d’avoir choisi.
Romain Duris, allez savoir pourquoi, peut énerver. Est-ce son jeu ? Son faciès ? Les rôles qu’il choisit ? Les trois ? Toujours est-il qu’il est un acteur qu’il est tout à fait possible de détester, jusqu’à De Battre Mon Cœur s’Est Arrêté. L’histoire de Tom, presque trentenaire et coincé entre le souvenir d’une mère idéalisée et la présence d’un père mal-aimé. Le résultat est une superbe confrontation entre le routard du cinéma qu’est Niels Arestrup face au jeune loup aux dents longues Romain Duris.
Tom passe le plus clair du film à tenter de s’extraire de l’influence néfaste d’un père agent immobilier tendance mafieuse et qui s’amuse à trouver l’âme sœur chez de jeunes filles. Au hasard d’une rencontre, il va redécouvrir son goût pour le piano au point de lâcher peu à peu ses activités douteuses, l’argent et les filles faciles et finalement, la vanité d’une vie vouée à l’échec. Reprendre le piano après si longtemps imposealors de réapprendre, de préférence avec une magnifique étudiante chinoise comme professeur que Tom regarde sans la voir.
Niels Arestrup est comme toujours parfait, quelle présence et quelle précision dans le jeu ! Et voilà donc que Romain Duris trouve avec ce film un terrain de jeu taillé pour lui, tour à tour petite frappe survitaminée et apprenti virtuose impatient de retrouver son talent de pianiste. Il parvient, par différents aspects de son jeu, à faire le lien entre les deux faces de son personnage, exercice pas si simple et parfaitement maitrisé.
Mise en scène impeccable, histoire profonde et prenante et acteurs au plus juste, en somme la cuisine habituelle de Jacques Audiard. Peut-être pas un film à la hauteur d’Un Prophète, mais une œuvre tout à fait honnête. On se demandera juste ce que vient faire ici Emmanuelle Devos, qui cachetonne avec un rôle parfaitement inutile et superficiel, un rôle de midinette qui vient faire l’amoureuse du vieux papa mais fort heureusement, elle ne suffit pas à gâcher le plaisir d’un très bon film.