Tout va vite, très vite, le fait divers débute en 1959 avant de se terminer 6 ans plus tard, Truman Capote rédige son livre le racontant en 1966 et dans la foulée Richard Brooks tourne In cold blood qui sortira une année plus tard.
Ce fait divers connu, du moins de l'autre côté de l'Atlantique, raconte une certaine vision du mal, qui surgit sans que l'on en connaisse les causes. C'est ce que Richard Brooks met en scène, et il le fait avec une noirceur et une froideur extrêmes. Passé sous les radars, ce metteur en scène parvient à mettre une vraie personnalité dans ses films, Elmer Gantry ou Graine de violence en sont de solides preuves, et In cold blood ne déroge pas à la règle.
Ici, c'est un pari ambitieux qu'il se lance, car il va tenter de faire une reconstitution extrêmement minutieuse (quitte à utiliser des lieux, comme la maison du crime, ou des personnes qui ont réellement participé à ce fait divers), tout en créant une atmosphère sombre, propice à l'exploration de l'âme humaine. Brooks ne se pose pas en juge, il met en scène le récit en s'assurant que l'on puisse se mettre dans la tête des protagonistes, qui ne sont eux, pas présentés comme le mal absolu, surtout que les actes de violence arrivent assez tard dans le récit.
Dès le début, on sent que l'on est en face d'un film atypique, Brooks use d'astucieux et novateurs procédés de mise en scène pour permettre à son atmosphère d'être la plus froide et troublante possible. Son utilisation du flash-back, le montage astucieux donnant lieu à des enchaînements de séquences mémorables, telle une pluie venant se greffer sur le visage d'un meurtrier, l'utilisation de la bande originale jazzy et tout simplement la construction du récit, il fait preuve d'une grande maîtrise derrière la caméra pour donner plus de force à son récit.
La froideur et noirceur du film n'annihilent pas les émotions, et certaines séquences, comme celle finale où l'on suit longuement des humains face à la mort, sont glaçantes. Brooks met en scène toutes les composantes du crime, de sa conception jusqu'à la finalité pour les coupables, il en profite ainsi pour mettre en avant certaines thématiques, comme la psychologie humaine ou la peine de mort. Il bénéficie aussi de la prestation exceptionnelle des deux comédiens principaux, Robert Blake et Scott Wilson.
En mettant en scène minutieusement un meurtre atypique, Richard Brooks nous emmène dans des esprits torturés et fait de l'intense In cold blood un thriller atypique, sombre, troublant et glacial, porté par deux remarquables comédiens et une mise en scène novatrice et au plus près de ces deux âmes.