Ce long-métrage ne choisit pas la facilité en traitant de sujets moralement durs et peu amènes tels que le suicide, le placement en foyer, l’échec scolaire ou le fait d’être orphelin à l’adolescence. Des thématiques lourdes et quelque peu rédhibitoires pour qui vient se divertir au cinéma. Mais Chad Chenouga les prend à bras le corps et parvient à les dissoudre et les assembler de manière limpide dans « De toutes mes forces », sans trop charger le portrait de ce jeune garçon placé en foyer après le décès de sa mère. Il nous permet également de faire la découverte du jeune Khaled Alouach, confondant de naturel et dont on devrait reparler très vite.
Outre l’interprétation entre résignation et fureur du jeune acteur, on apprécie de retrouver la trop rare Yolande Moreau dans un rôle qui lui va comme un gant. Le long-métrage se place directement dans la droite lignée d’un cinéma dit du réalisme social à la Ken Loach. Mais c’est surtout aux frères Dardenne qu’on pense. En effet, le film ne s’embarrasse pas de la forme et suit au plus près les soubresauts de cette période charnière vécue par le jeune adolescent avec une image volontairement brute, proche du documentaire calquée sur un sujet 100% social. Un choix artistique en totale adéquation avec le sujet. Chenouga choisit également la voie du déterminisme social le plus entier, son personnage n’ayant que peu d’échappatoires à sa condition jusque dans les dernières minutes. Un parti pris discutable mais assumé.
En revanche, « De toutes mes forces » frôle souvent l’excès dans les déboires rencontrés par le jeune Nassim. On pense parfois à « Précious » de Lee Daniels tant le scénario accumule les obstacles pour son personnage principal. On est à la limite d’un certain misérabilisme dans ce foyer pour jeunes où certains clichés pleuvent mais sans jamais tomber non plus dans le voyeurisme malsain. On regrette également qu’après une première partie dynamique la dernière demi-heure tourne en peu en rond et souffre de longueurs. Le long-métrage aurait gagné à être resserré d’une quinzaine de minutes. On est donc face à un drame sensible et bien interprété mais qui pêche un peu par excès de dramaturgie. Le parfait film pour proposer un débat télévisé en seconde partie de soirée.