Un nouveau documentaire de Ruffin, qui semble apprécier sa collaboration avec le réalisateur savoyard (et social) Gilles Perret. Moins percutant que Merci Patron, mais qui était vraiment le top en matière de dénonciation rigolarde. Moins drôle aussi, plus dans la lignée à vrai dire de J'veux du soleil, en cela qu'il fait une large part à rendre visibles les invisibles, cette France dite d'en bas totalement ignorée (et méprisée) par la plupart des politiques et des médias, qui, il est vrai, ne sont pas du même monde, comme on dit.
Ruffin a une certaine notoriété, en tant que cinéaste et député, et qu'il en profite pour faire un tel film, c'est très bien. Même si l'immense majorité de ses spectateurs seront des gens déjà acquis, ne rêvons pas. Pour autant, il nous montre des personnes dignes et chaleureuses, des femmes dans le film, dont le revenu moyen tourne autour de 700 € net par mois. Et qui pourtant bossent et se tapent des temps de transport souvent au-dessus de la moyenne. Et qui pourtant font des métiers indispensables à la vie en société, s'occupant des handicapés, des impotents, des personnes âgées et de nettoyer les déchets de ceux que la société considère (et rémunère) beaucoup mieux pour un travail dont l'utilité saute bien moins aux yeux. C'est là à mes yeux le principal mérite de ce documentaire.
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Après Ruffin, c'est quand même un politique : a-t-il été contaminé par ceux qu'ils fréquente ? Il a un peu tendance à se mettre en scène (même s'il en fait moins que dans son documentaire précédent) et il a beaucoup tendance à jouer sur le registre de l'émotionnel. Difficile malgré tout de lui jeter la pierre sur ce dernier point : d'abord parce que c'est bien fait et que ça fonctionne, ensuite parce que ses pairs, comme la plupart des médias, n'utilisent quasiment plus que ce registre. Il faut bien dire que lorsqu'ils tentent de se placer sur celui de la raison, leurs présupposés (à base de rationalité avant tout économique, s'entendant au sens néo-libéral) sont tellement rejetés qu'ils rechignent à le faire.
Enfin, le film ne serait pas ce qu'il est sans la présence de Bruno Bonnell (qui bosse à l'assemblée avec Ruffin sur les "métiers du lien", quelle horrible formule de novlangue, soit dit en passant), entrepreneur lyonnais jovial et grassouillet devenu député Playmobil par seule grâce de la sacro-sainte cinquième république. Sensible certes à la question des assistantes de vie, mais uniquement parce qu'il y a été confronté dans sa vie personnelle. Sans quoi, il n'en aurait probablement eu rien à cirer, ses centres d'intérêt dans la vie allant manifestement plutôt vers la préparation des quenelles lyonnaises dans sa cuisine de luxe. Toujours est-il qu'il constitue avec Ruffin un duo qui contribue au film et au message qu'il entend faire passer.