(Ce que j’écris ci-dessous peut dévoiler certains pans de ce film que je tiens pour simplet – comme l’est ma "critique" - et outrancier à la fois.)
Il semble que les auteurs se soient inspirés d’autres films bien connus, sans aucune maîtrise (et si j’en cite deux ou trois ce n'est pas pour prétendre être une connaisseuse que je ne suis pas) :
il y a a de "Amadeus" à la table de ce duc : les rires, les perruques plus ou moins de guingois, ridiculement échevelées, les mouches... ; le final en pochardise dans le restaurant, etc.
"Tous les matins du monde" entre autres dans l’arrangement du décor à la manière de tableaux du XVIIe-XVIIIe, ici tout en profusion, que l’on ne peut poser les yeux sur un coin de l’image sans y voir amoncellements d’aliments, d’aiguières, de jarres, de suspensions, de meubles, de casseroles en cuivre bien briquées, etc., jusqu'à l’arrangement de nappes ou torchons trop savamment disposés sur le coin d’une maie, ou un lapin posé incongrûment sur celui d’un placard ; le tout éclairé par des bougies qui brillent a giorno, pour faire une jolie lumière. Cette débauche est d’autant moins crédible que ce cuisinier est censé être sans le sou (et, entre autres que les chandelles étaient dispendieuses pour le petit peuple). Sa chaumière est fort achalandée, très, trop proprette sauf les nombreuses toiles d’araignée qui pendent au plafond comme il en serait dans une cave abandonnée depuis longtemps. Jusqu'au cellier avec son abondance de tonneaux, de fûts et d’outils divers. Sans oublier les grappes de ceci et cela qui pendent aux murs, et on ne sait quoi pour ajouter à un décor abondamment surchargé. On peut y sentir le dessein de faire dans la belle esthétique mais bien trop d’excès et un manque flagrant de maîtrise et d’inspiration rendent l’effort ridicule voire prétentieux. Pourtant pour certains spectateurs, lumière et décors sont un grand atout du film.
Parmi les références : ces films où l’homme fait goûter voluptueusement des aliments à la femme. Ici il n'est pas question de volupté ou à peine, mais l’idée semble là. Résultat ridicule. A savoir notamment quand le cuisinier semble soudain accepter de prendre la femme en apprentissage – sans qu’il y donne suite - et lui explique que pour cela, elle doit connaître les aliments. A cette fin il lui demande de reconnaître, yeux fermés : une noix, une lamelle de champignon, une rondelle de champignon, un peu de betterave (que la dame peine un peu à identifier). Qui ne saurait le faire aisément ? Et tous deux d’exprimer le contentement lorsque la femme passe brillamment l’épreuve. A noter que la betterave – renseignements pris confirmant – n’était pas un aliment très utilisé en France à cette époque. Quant à la pomme de terre, au moment du renvoi du cuisinier, il semble qu’elle était bien moins boudée par la noblesse et les réactions des convives est trop outrée surtout de la part de gens qui se vantent de fréquenter le Monde de Paris.
Un peu de "Ridicule" en entrée, lorsque les aristocrates s’essaient aux bons mots, avec présence obligé d’un abbé dont l’avis tranche comme un couperet et fait tourner les sentences précédentes comme girouette au vent.
L’acharnement de ce cuisinier à ne pas faire de la femme son apprentie, tout comme celui de la femme à vouloir l’être pendant tous ces longs mois ne tiennent pas plus la route.
Les revirements des personnages sont des plus surprenants. Comme il a été cité dans une critique, je reprends celui du grand valet, caricature du petit personnel tout dévoué à un maître comme s’il s’agissait de ses propres intérêts qui, tout soudain, se dissocie de lui sans aucun prémisses et bien au contraire.
Les poncifs, caricatures, stéréotypes ne manquent pas et sont assez grossiers.
Petite mention aussi au cascadeur qui a remplacé l’acteur pour la chute de cheval sans grand succès de crédibilité.
Les motivations de la femme, lorsqu’elle vient à les avouer, sont tortueuses à souhait et son projet est des plus aléatoires. Globalement, les raisons qui la stimulent ne justifient pas ces longs mois qu’elle passe dans ce coin de campagne perdue, à s’abîmer ainsi les mains pour ne parler que de cela. J’entends mal qu’une femme de sa condition accepte avec une telle docilité et sans aucune morgue d’être valet de ferme et bonne à tout faire, et même pense à venir s’échouer là. Pire, ce contraste inopérant avec les représentations tout en lourdeur, de l’aristocratie.
La soudaine scène où elle éclate de colère lorsque le duc ne se présente pas à l’auberge qu’il a réquisitionnée préalablement, est disproportionnée – et sur-jouée - malgré les raisons qui la motivent. Surtout au vu de la docilité de la dame pendant tout le métrage et son intelligence et sa gentillesse qui auraient dû lui faire prendre la mesure des dangers qu’elle allait faire courir son non-mentor.
L’époque charnière pendant laquelle se déroule le film est bien peu effleurée et même si ce n'est pas le propos politiquement parlant, devrait toutefois se faire sentir. Quelques échos ci et là s’hérissant de manière incongrue, aussitôt oubliés.
Les paysans venant manger à l’auberge sont bien proprets et "civilisés". Ce qui m’amène à ce qui semble être un des propos du film. La démocratisation de la bonne nourriture ; non seulement l’idée est survolée mais assez abrupte. par aillers, je ne crois pas qu’un membre de la "basse classe" pouvait s’offrir derechef un repas digne de ce nom à la guignette du coin. Il aurait été intéressant de faire germer la progressivité de cette nourriture pour tous, mais il est vrai que les lacunes dans ce film sont légions et que cet aspect pourrait paraître secondaire.
Dans l’ensemble, plusieurs chemins sont ouverts puis aussi tôt délaissés.
Soulignons quelques anachronismes.
Quant à l’acteur principal, plébiscité ça et là : pour moi une interprétation dilettante et le regard de myope dénué d’émotion qu’il arbore tout le long du métrage n’aide pas à donner de l’assise à son personnage.
Madame Isabelle Carré, que je supporte bien mal pour ma part, pourrait être crédible si son rôle le permettait. Les rides plus ou moins naissantes de son visage aident à lui donner consistance.
Voici quelques exemples qui décrédibilisent l’ensemble, déjà mené à mal par des enchaînements et des situations grandement prévisibles.
Je cherche des points positifs et n’en trouve pas de décisifs. J’ignore si les auteurs ont voulu faire un film historique et il a beaucoup été expliqué ailleurs qu’il ne l’était pas. Il reste donc un divertissement gentillet. Tant qu’à visionner un film sur la cuisine au Grand Siècle autant choisir "Vatel" je crois, bien que certains n’hésitent pas à le traiter de boursouflé (?).