Taïga con dios.
[Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs : Ochazuke] Lorsqu’on jouit d’une filmographie aussi dense et prestigieuse que celle de Kurosawa, le défi pour se renouveler et poursuive son œuvre peut...
le 24 janv. 2015
92 j'aime
11
L’humilité est le premier mot qui me vient à l’esprit pour décrire le film Dersou Ouzala d’Akira Kurosawa. Ce film sorti en 1975 était un projet qui lui tenait à cœur depuis des décennies. Basé sur le livre éponyme de Vladimir Arseniev publié au début des années 20, le film raconte une rencontre qui bouleversa le « capitaine russe» Vladimir Arseniev, celle de Dersou Ouzala, un chasseur golde (une minorité de quelques milliers de personnes en Russie orientale) qui ne faisait qu’un avec la taïga. L’humilité de la vie de ce chasseur va rendre possible cette relation maître/apprenti qui est d’une discrétion et d’une pédagogie propre à ce petit homme, Dersou. L’humilité de Vladimir, faisant abstraction de tout apartheid social ou ethnique, est bien sûr essentielle dans cette balance, cette harmonie qui va régir cette relation.
La nature de la région d’Oussouri est envoutante. Le film est coupé en deux parties qui sont fortement contrastées en termes de paysages. La première, qui est marquée par la rencontre, a lieu en hiver, alternant forêts enneigées et des plaines qui, tels des déserts blancs, s’étendent à pertes de vues. La seconde, qui débute par les retrouvailles, montre les forêts denses et humides du printemps puis les magnifiques couleurs de l’automne, court répit avant un nouvel hiver glacial.
Certains, dont moi, verront dans ce film un bel espoir que la lutte des classes n’a pas lieu d’être. Arseniev, intellectuel et certainement issu de la bourgeoisie, est tout sauf hautain envers Dersou, car il comprend tout de suite qu’il a beaucoup à apprendre et que tout ne se trouve pas dans les livres et son éducation. Dersou, quant à lui est heureux de partager son savoir avec son « capitaine » et le respect qui lui voue n’a en rien à voir avec une quelconque convoitise ou jalousie.
L’esprit de la nature, représenté par le tigre, majestueux et terrible, est une puissance au-dessus de l’humain. Pour Dersou, chaque chose à une âme. De ce fait, tout doit être respecté. Conscient de cette toute puissance, cet enfant de la taïga en a également une peur bleue. Au moment où il estime avoir offensé la nature, en tirant sur un tigre, Dersou sait que l’affront ne restera pas impuni.
Dersou Ouzala est sans doute l’amitié la plus harmonieuse, la plus humble et la plus improbable vue au cinéma. Une belle histoire dont la morale pourrait être
Vous allez vous aimer les uns les autres bordel de merde !
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes L'appel sauvage, Ces remakes préférés aux originaux, Mon Top 70 des années 70 et Le Japon fait son cinéma
Créée
le 6 févr. 2016
Critique lue 790 fois
41 j'aime
6 commentaires
D'autres avis sur Dersou Ouzala
[Série "Dans le top 10 de mes éclaireurs : Ochazuke] Lorsqu’on jouit d’une filmographie aussi dense et prestigieuse que celle de Kurosawa, le défi pour se renouveler et poursuive son œuvre peut...
le 24 janv. 2015
92 j'aime
11
Dersou Ouzala, c'est d'abord la renaissance du Phoenix Kurosawa qui après l'échec cuisant de Dodes'kaden a tenté de se suicider, fort heureusement, ce fut un échec. Il nous revient 5 ans après avec...
le 2 sept. 2013
90 j'aime
5
Exploiter l’adversité que réserve dame nature aux intrépides aventuriers pensant amadouer le sol de contrées qui leur sont inhospitalières, pour construire l’attachement réciproque qui se construit...
Par
le 14 déc. 2014
58 j'aime
8
Du même critique
Whiplash est un grand film. Il est, selon moi, le meilleur de l’année 2014. Une excellente histoire alliant le cinéma et la musique. Celle-ci ne se résume pas à une bande son, mais prend ici la place...
le 20 janv. 2015
192 j'aime
11
Je viens de vivre un grand moment. Je ne sais pas si c’est un grand moment de cinéma, mais ce fût intense. Mad Max: Fury Road m’en a mis plein la gueule. Deux heures d’explosions, de fusillades et de...
le 16 mai 2015
182 j'aime
21
Lèvres pincées, cheveux gominés, yeux plissés et rieurs, main plongée dans sa veste et crispée sur la crosse d'un revolver, Robert De Niro est dans mon salon, prêt à en découdre une nouvelle fois. Il...
le 29 nov. 2019
153 j'aime
10