"Pourquoi un chien remue-t-il la queue?
Parce que le chien est plus intelligent que la queue. Si la queue était plus intelligente que le chien, c'est la queue qui remuerait le chien..."
A 11 jours des élections aux États-Unis, le président est englué dans un scandale à base de harcèlement sexuel qui lui coûtera sa réélection si l’affaire n’est pas étouffée. La Maison-Blanche fait alors appel à un spécialiste de la désinformation, Conrad Brean (Robert De Niro), pour trouver une solution. Avec l’aide d’un producteur de cinéma (Dustin Hoffman, génial), il monte alors une guerre inventée de toute pièce, en diffusant de fausses images aux informations, afin de détourner le public des affaires de mœurs du président...
Qu’on aime ou non les Américains, il y a tout de même chez eux une chose qui fascine : leur capacité à se moquer d’eux-mêmes sur des sujets capitaux. Avec Des hommes d’influence, c’est Barry Levinson qui s’y colle, nous proposant une satire hilarante, effrayante et captivante (malgré quelques longueurs vers la fin) de la manipulation politique.
Alors qu’il y aurait beaucoup à dire sur ceux qui inventent des scandales pour faire couler un candidat (une spécialité bien de chez nous...), Levinson s’intéresse à l’autre extrémité du processus : ceux qui cherchent à désamorcer ces scandales. De ce côté-là de la barrière, on trouve ainsi Robert De Niro et Dustin Hoffman, incroyables dans leur rôle de menteurs politiques, aussi cyniques qu’attachants. De fait, à la suite d’Hoffman, on se prend rapidement au jeu et l’on n’espère plus qu’une chose : voir gagner nos menteurs préférés, sans même se soucier de qui est la crapule, dans l'histoire.
Sans s’y attarder plus que de raison, Levinson nous décrit donc toutes les étapes de cette implacable mécanique qui manipule les sentiments du public à des fins électorales, créant des slogans, des chansons et même des vidéos de civils pris sous le feu de terroristes imaginaires, diffusés par des journalistes dénués de conscience, afin de tirer des larmes d’un peuple bien trop friand de ces nouvelles pour se soucier de leur authenticité.
On ne peut pas ne pas penser à un autre peintre aussi génial que cruel de la société, Billy Wilder, en voyant cette satire féroce et constamment juste, portée par un scénario d’un brillant machiavélisme signé Hilary Henkin et David Mamet (scénariste des Incorruptibles). Ainsi, comme chez Wilder, l’on retrouve ici cette description au vitriol d’un monde entièrement tourné vers lui-même, qui ne se soucie des autres que lorsque cela sert son propre intérêt, un monde rempli de mensonge et de cynisme, gouverné par un système corrompu et déshumanisé, qui se pare des atours de la liberté pour justifier les actions les plus innommables, et qu'on nomme "démocratie".
"- Le Président sera un héros. Il aura mis fin à la guerre.
- Mais au départ il n'y a jamais eu de guerre...
- Alors, c'est un bien plus grand exploit !"