Plympton est un réalisateur que je découvre sur le tard. C'est presque un comble pour quelqu'un comme moi qui se prétends grand amateur de cinéma d'animation. Qu'à cela ne tienne, tout ce que j'ai vu des long-métrages du bonhomme jusqu'à maintenant m'ont semblé percutant, ou à minima, m'ont semblé faire preuve d'une grande sensibilité, ce qui mériterai le visionnage de son oeuvre du plus grand nombre de spectateurs.
Dans ce film-ci, le réalisateur fait preuve d'une utilisation de la couleur totalement maitrisé avec des nuances de gris prédominantes, pourtant très variées et dont la profondeur est très impressionnante. Cela est dû également à une étude de la lumière plus travaillée qui donne beaucoup plus de corps et de formes aux personnages qui apparaissent à l'écran. On y voit un vrai bond en avant depuis son long-métrage précédent "Hair High". On verra d'ailleurs cette même évolution dans son film suivant "Les amants électriques". Cette force dans le dessin, fait que l'on pourra pardonner sans soucis les quelques errances dans l'animation où l'on n'y retrouvera pas l'expérience connue dans le cinéma d'animation plus grand public où tout est très fluide. Ici, l'interpolation est une technique qui semble avoir été sacrifiée. Cela s'explique par la taille de la production et les finances qui n'atteignent pas le même niveau que celles des mastodontes du genre. On aurait donc tord de comparer leur travail (coucou Disney/Pixar).
Pour "Des idiots et des anges", le réalisateur pousse un cran plus loin le paradigme de: "la forme en tant qu'expression ultime du fond". Il n'y a aucun dialogue, tout du moins, pas dans une forme d'expression compréhensible. Par là, j'entends que les quelques voix aux effets "Yaourt" montre plus un échange entre deux personnages qu'une évolution plus classique de la narration. Les péripéties oscille tantôt entre le fantasme, le surréalisme et le pragmatisme dépressifs d'un monde réaliste. Elles sont mises en scène de manière très originales, une habitude chez ce cher Bill qui vient toujours nous arracher un sourire ou parfois des larmes. Rien que le synopsis devrait vous mettre la puce à l'oreille. Les musiques qui soulignent l'action à l'écran sont toujours dans le ton. Sur ce point, je n'ai pas grand chose d'intéressant à dire.
Les thématiques que semblent vouloir développer le film sont plus originales, ou plutôt spirituelles, que celles des autres long-métrages du réalisateur que j'ai pu voir, où l'amour (celui avec un grand A) semble être un sujet que le réalisateur tiens à coeur. On y verra bien ce thème entre parenthèse dans le dernier quart d'heure du film et semble même hors-sujet avec le reste. Il s'agit là d'une faiblesse du récit, en voulant être plus complet, rien n'est vraiment développé jusqu'au bout. On a l'impression que l'histoire nous lance sur des pistes de réflexions mais jamais que nous irons plus loin que ce que le film à voulu introduire. Ceci dit, ce n'est pas un défaut majeur étant donné que le cinéma de Bill Plympton est plus apprécié pour ses mises en scène parfois grand-guignolesque, parfois macabre, mais toujours créative. Comme dit plus tôt, on privilégie la forme plutôt que le fond. Si je voulais pinailler un peu plus, je dirai aussi que lorsque le héros s'éloigne de la trame principale, l'histoire devient un peu moins intéressante et on a l'impression que la narration fait un retour en arrière. On perds le plaisir de voir un sacré trou du cul, pervers et colérique se transformer en un samaritain pour mettre en avant un antagoniste, comme si le récit en avait besoin, alors que tous le propos se tiens sans. D'où la "récompense" du héros qu'est la relation romantique avec le personnage de la blonde du bar, mais difficile de ne pas trouver que cette portion du film est de trop.
C'est d'ailleurs l'unique point qui m'empêche de considérer ce film comme un chef d'oeuvre. Mais bon, c'est déjà un excellent film avec des qualité remarquables, on s'en contentera.