Plutôt que prétendre à un reportage sur les émeutes populaires, violences policières, pillages, incendies et zones de guerre de Detroit en 1967, et de dénoncer comme d’autres l’ont déjà fait la guérilla issue du racisme socio-juridico-politique aux USA, le film joue la carte de l’émotionnel, dans une ambiance de plusieurs huis-clos, focalisés sur les comportements et destins d’un microcosme social. Cette illustration d’un état général, dramatique, insupportablement longue, violente et sadique, frappe efficacement et se poursuit dans l’édifiante parodie de justice qui ne laisse que la force de hurler de rage, d’impuissance et d’injustice.
Triple pari gagné pour ce film choc, parfois un peu trop pollué par une ambiance et un sentimentalisme télévisuels, mais à l’objectif atteint. D’abord par son génie de la mise en lumière de l’état de guerre urbaine et d’injustice raciale de la vie publique tout en n’en montrant finalement assez peu. Ensuite pour son efficace et effroyable témoignage des tensions, violences, excès, basculements dans la folie issus de l’imbécilité tragique et triomphante de la haine et du racisme, tout en ayant la finesse d’éviter la caricature binaire en soulignant aussi les conflits entre Noirs ou entre Blancs ou les rares bonnes volontés de tous bords. Victoire enfin pour le compte-rendu historique, certes hypothétique et dramatisé, mais probablement plus réaliste qu’on ne le suppose, de la tragique nuit du 25 juillet au motel Algiers, exploitée ici pour dénoncer l’intolérable dans une œuvre glacée et puissante.