Un regard
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Il y’a de ces films, de ces premiers films qui, implicitement, éveillent dans l’âme du cinéphile que je suis, un profond sentiment de plaisir à leur vision, Deux de Filippo Meneghetti est l’un de ces films.
La tâche de réaliser sa première œuvre cinématographique, en sachant qu’elle sera peut-être la seule et l’unique d’une carrière, n’est jamais aisée et présente bien des obstacles. Certains échouent et tombent dans l’oubli ; d’autres accouchent, dans la douleur ou non, d’un prototype bancal, dans l’indifférence du public ; et puis, quelques heureux arrivent à transcender leur scénario et offrent un premier essai qui déconcerte la critique ou le public (parfois les deux) par la maîtrise et la maturité qui s’en dégagent.
Deux qui raconte une idylle enfouie et dissimulée de deux seniors (Nina et Madelaine), voisines de palier souhaitant échapper à un quotidien étouffant pour vivre pleinement leur relation sous le soleil de Rome, constitue une remarquable entrée en matière pour son réalisateur.
Alors que ce genre de cinéma dramatique et social, qui inonde les toiles des cinémas français depuis belle lurette, paraît de plus en plus fade et de moins en moins inspiré ; certains métrages sortent du lot, rappelant ainsi que ce qui compte précisément dans ce style cinématographique, c’est de la sensibilité, de la poésie et une réflexion à la fois sur la forme et sur le fond pour concevoir un film cohérent. Trop souvent, ce style de films intimistes se repose sur ses acteurs et l’empathie du spectateur qui assiste, souvent, à des histoires tragiques, des intrigues empreintes d’une dureté naturaliste, et j’en passe. Filippo Meneghetti, tout en offrant deux magnifiques partitions à ses deux interprètes, comédiennes confirmées de longue date, ne tombe pas dans ces travers complaisants et autosuffisants. Sa mise en scène tintée de lyrisme et qui se purge de toute artificialité pour coller au plus près de son propos et de ces personnages à fleur de peau, imparfaits, fragiles et vulnérables, gratifie le récit d’une élégance et d’une dimension émotionnelle qui n’ont d’égale que la justesse de sa narration.
Si le cinéaste italien arrive tant à sublimer son scénario (coécrit avec Florence Vignon), c’est indéniablement parce qu’il sait de quoi il parle. A travers chaque séquence, chaque action, chaque geste et chaque regard, éclate une authenticité et une sincérité de ton. Ce couple formé par Nina et Madeleine, cet amour et cette tendresse qui s’illuminent lorsque l’une et l’autre se regardent, la caméra de Meneghetti arrive à les capter et c’est ce qui contribue à la réussite du film.
Bien que la trame principale regorge de thématiques habilement exploitées comme le mensonge au sein de la cellule familiale et l'homosexualité au troisième âge, là où Deux est moins à son avantage, c’est lorsque des intrigues secondaires viennent parasiter le bon déroulement du récit. La fluidité de la narration en prend un coup et cette histoire d’aide-soignante me semble être, en toute honnêteté, plutôt peu convaincante dans son écriture et son évolution scénaristique. Certaines facilités scénaristiques sont également à notées. Fort heureusement, elles réussissent à s’imbriquer, sans trop paraître grossières, dans le canevas du récit.
En définitif, s’il fallait retenir une scène de ce Deux de Fillipo Meneghetti, ce serait sans doute son final, beau et doux, comme les deux visages de ces femmes que l’amour qu’elles partagent et qui les lie, rend si gracieuse à l’instar de la photographie et de la lumière qui illuminent tout le film d’une chaleur enivrante.
Créée
le 8 juil. 2020
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