Dans sa Bulle

S'il y a bien une constante dans les thématiques du cinéma de Cédric Klapisch, c'est de mettre en scène le passage à l'âge adulte, avec une légèreté pouvant cacher des aspects plus graves, ainsi que la solitude humaine, ce qu'il fait avec Deux Moi.

Ici il s'attache à deux âmes perdues dans un Paris paraissant gargantuesque qu'il sublime, comme souvent, et fait d'abord errer ses deux êtres dans un quotidien où la solitude s'impose comme premier constat. Il n'en fait pas le procès mais, ça va définir ces deux personnages qui se cherchent, et qui vont d'ailleurs se croiser sans pour autant se connaître. Il les rend attachants et surtout ils sont de tous les plans ou presque, tant les personnages secondaires font plus office de figuration que d'un véritable apport.

C'est pourtant à travers eux qu'il va apporter une touche plus légère (le chat, un très drôle Simon Abkarian ou encore Zinedine Soualem) ou au contraire plus grave, notamment avec la famille. C'est sur ce point-là que Klapisch se montre le moins convaincant, lorsqu'il étudie les traumatismes du passé ou l'héritage parfois douloureux des parents, perdant en subtilité et alchimie. Ce n'est pas non plus préjudiciable, le plus important reste le tableau des deux protagonistes et à travers eux d'une génération plus seule malgré les réseaux sociaux, ce qu'il ne blâme pas, son but n'étant pas de se poser en moralisateur.

Avec la capitale en décors, il parvient à poser un regard plutôt tendre sur ces deux trentenaires, à la croisée entre deux générations et surtout, prisonniers d'une solitude dont ils chercheront à s'évader, sans forcément utiliser les bons moyens. Ce sont deux êtres qui se cherchent sans forcément comprendre, ou du moins s'adapter au monde qui les entoure. On trouve aussi dans Deux Moi un peu de poésie urbaine et le cinéaste parvient à trouver la bonne alchimie avec les moments plus légers, à l'image des premières séances avec les psychologues.

Il sublime aussi le cadre du récit, se servant des petites rues parisiennes, des transports ou de la bande-originale pour enrichir son récit, et proposant ainsi une atmosphère prenante, avec l'impression d'entrer dans la bulle des deux protagonistes. L'attachement est vraiment le sentiment qui prédomine, et Klapisch dirige ses comédiens avec brio et le duo composé de François Civil (reprenant le type de personnage jadis campé par Romain Duris) et Ana Girardot fonctionne à merveille.

En signant Deux Moi, Cédric Klapisch continue d'étudier ses thèmes de prédilection et sublime un duo sensible et attachant, avec un Paris gargantuesque ne faisant qu'accentuer la solitude qui pèse sur eux, ainsi qu'une justesse pour créer une atmosphère prenante, donnant l'impression d'être dans la bulle de ces deux âmes.